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29/11/2008

Langues régionales : courriel à Mme Carrère d'Encausse

Chaque année le secrétaire perpétuel de l'Académie française fait un discours sur l'état de la langue française. Mme Carrère d'Encausse a prononcé ce discours le 27 novembre et elle y évoque notamment la place des langues régionales en France et le débat sur leur  introduction dans la Constitution, lors duquel la vénérable institution crût opportun d'intervenir. Le discours est assez long mais vous pouvez aller le lire sur le site de l'Académie (lien en fin de note); en voici un extrait ainsi que le texte d'un courriel que j'ai envoyé au secrétaire de la Secrétaire perpétuel. Je publierai une réponse éventuelle, evel rezon !

Extrait du discours de Mme Carrère d'Encausse :
"Les dialectes et patois que le progrès technique et celui des institutions ont progressivement écartés de la vie sociale appartiennent sans aucun doute à notre patrimoine national. Et aucune institution ne le pense plus que l’Académie française, attachée à toutes les formes d’expression, et qui souhaite ardemment la préservation de ces parlers, part infiniment précieuse de notre vie commune. L’identité française peut se penser et se dire en plusieurs langues, cela est incontestable, car la France est le pays de la diversité des hommes et de la culture. Mais cette diversité reconnue n’implique pas de juger ou d’administrer en plusieurs langues, car cela relève d’une autre logique, celle de l’État, celle de la sphère publique qui est celle de l’unité. Défense de la diversité des cultures, garantie de l’unité de l’État et de ses institutions, ces deux exigences qui ont jalonné l’histoire de France suggèrent la voie à suivre aujourd’hui dans une paix des esprits retrouvée. Ratifier la Charte européenne ouvrirait la voie à d’innombrables conflits et serait vain. Mais il est bon de consolider par la loi les acquis récents – la place faite aux langues régionales dans le système éducatif ; la garantie de multiples usages qui relèvent du respect de traditions bien ancrées dans les régions. La toponymie en offre un bel exemple ; dans la plupart des régions de France, les noms des lieux sont indiqués en français et en basque, en breton, en corse…
Les querelles de langues sont en réalité dépassées. Car le problème auquel nous sommes confrontés désormais n’est plus de savoir ce qui l’emportera en France, du français ou des langues régionales, mais comment le français, enrichi dans la profondeur des consciences du patrimoine des langues régionales, va pouvoir se frayer un chemin dans un monde totalement ouvert et multilingue."

Ha setu ma lizher din-me, kaset dre mail/Et voici mon courriel :

"Bonjour
Je viens de lire le discours de Mme Carrère d'Encausse sur l'état de la langue française. A lire ce qu'elle écrit, je suis un peu surpris. Est-elle bien informée sur la charte européenne des langues minoritaires et les articles que le gouvernement Jospin a signé à l'époque ? Aucun ne prévoit que les langues régionales servent à la justice ou à l'administration ! Il y est question de soutien aux médias, à l'enseignement, en langues régionales.
Sur les 80 (environ) articles proposés par la charte certains prévoient que des langues régionales peuvent servir à l'administration, à la justice notamment pour les populations qui parlent uniquement leur propre langue, et pas celle de l'Etat qui les administre, quoi de plus normal? Mais le gouvernement de la République française n'a pas signé ces articles là.
La ratification de la charte européenne des langues minoritaires et un faux épouvantail que les vrais opposants au maintien d'un plurilinguisme en France agitent, avec un certain succès d'ailleurs puisque même l'Académie s'y laisse prendre.
Je ne suis pas en désaccord avec tout ce que dit Mme Carrère d'Encausse mais présenter le recul des langues régionales comme le seul fruit d'évolutions techniques et institutionnelles me parait largement inexact. Il y a eu une véritable répression linguistique sur des générations de Bretons (par exemple), qui n'ont pas abandonné leur langue maternelle par simple "évolution" mais sous la contrainte. Aujourd'hui, la convention internationale des droits de l'enfant reconnaît à chaque enfant le droit d'être éduqué dans sa langue maternelle. La France, elle, a refusé cela  à des générations de Français pour leur imposer une seule langue. La langue française aurait pu être introduite sans que l'on élimine les autres. Le choix aurait pu être fait d'une éducation bilingue (dont on loue aujourd'hui les bénéfices). Au lieu de cela, on a coupé des générations de leurs langues maternelles, de leurs langues régionales, on a gommé la richesse de ces langues, leur histoire, leur littérature. On les appelle "patois", "dialectes" "idiomes"... Heureusement, en 2008, le Parlement les rétablit dans leur véritable statut : des langues. Mais que de traumatismes, que d'erreurs, que de gâchis. Que de mépris !
Et que dirait l'Académie française si un Etat agissait ainsi à l'égard de populations francophones ?
J'espère de Mme le secrétaire perpétuel, une réponse à ce courriel.

Get ma gwellan sonjoù
Avec mes respecteuses salutations"

Christian Le Meut

http://www.academie-francaise.fr/immortels/discours_SPA/c...

27/10/2008

Peuchère, Marius a perdu son accent marseillais !

On lit parfois dans la presse des citations qui surprennent un peu comme celle-ci, tiré du Monde (30 septembre 2008), concernant la mise en scène de la pièce de Pagnol, "Fanny", par la Comédie française, jouée sans l'accent marseillais : “Ce choix est revendiqué haut et fort par Muriel Mayette, l’administrateur général de la Comédie-Française, et par Irène Bonnaud, la metteuse en scène de la pièce, qui entend rendre justice à “l’universalité” de Pagnol, et “démontrer que Fanny n’est ni folklorique ni pittoresque, mais une des grandes oeuvres du répertoire théâtral français”.

Parce que jouée avec l'accent marseillais,"Fanny" serait "folklorique" et "pittoresque" ? Pourquoi ça ?  Pourquoi l'accent marseillais serait-il moins "universel" que l'accent français standard que l'on entend dans les médias ou à la Comédie française ? Jouer Fanny sans cet accent, pourquoi pas, mais pourquoi prétendre que cela rendra la pièce plus "universelle" ? Le français se parle dans le monde entier avec des centaines, ou des milliers, d'accents différents à Toulouse, Lyon, Bordeaux, Marseille, Genève, Dakar, Bamako, Bruxelles, Port-au-Prince, Québec, et j'en passe. Ces accents là aussi sont "universels", tout autant que l'accent français standard qui sert dans la plupart des médias, mais ces derniers nous habituent peu, hélas, à cette variété d'accents.

J'ai le souvenir d'avoir vu les trois films de Pagnol, la trilogie, Marius, César, Fanny : le fait que les acteurs parlaient avec l'accent de Marseille (sauf M. Brun, un Lyonnais, lui), n'empêchait ni la compréhension, ni de goûter à la profondeur du texte, mais rajoutait, au contraire, une vraie saveur. Qui sait si, en perdant son accent, Marius ne risque pas, au contraire, de perdre un peu de son "universalité" ? Les personnes qui voudront se faire une idée pourront regarder cette pièce samedi prochain, 1er novembre, sur France 2.

Christian Le Meut

Peuchère ! Marius 'n'eus kollet e taol mouezh !

Lennet  e vez traoù drol, barzh ar c’hazetennoù, a wezhoù : ar pezh c’hoari Fanny, skrivet get Pagnol, a zo kinniget e Paris hiriv an deiz get ar “C’homedie française” hag an aktourion ne gomzont ket get taol mouezh Marseilh... Ar perak a zo displeget mod-se barzh Le Monde (30/09) : “Ce choix est revendiqué haut et fort par Muriel Mayette, l’administrateur général de la Comédie-Française, et par Irène Bonnaud, la metteuse en scène de la pièce, qui entend rendre justice à “l’universalité” de Pagnol, et “démontrer que Fanny n’est ni folklorique ni pittoresque, mais une des grandes oeuvres du répertoire théâtral français”.
Ha perak e vehe “folklorique” ha “pittoresque” komz galleg doare Marseilh war al leurenn, e Pariz ? Perak dilezel an taol mouezh-se ? N’eo ket ken “hollvedel” evit an taol mouezh “standard” klevet e Paris, er mediaioù ha c’hoazh ? Ha doujus eo, an dibab-se, e keñver Pagnol e-unan ?
Meur a feson a zo da gomz galleg, e Marseilh, Tolosa, Bourdel, Lille, Bruxelles, Genève, Dakar, Beyrouth, Montréal, ha me oar me. “Hollvedel” int, holl. Met pas evit tud zo a gav gwelloc’h lakaat un taol mouezh galleg “standard” (ho hini marteze), e begoù Marius, Fanny, Escartefigue, ha c’hoazh. Domaj eo, d'am sonj, rak an taol mouezh-se a gas saourentez d’ar pezh c’hoari (a vo skignet a-benn disadorn war Frans 2).

23/09/2008

Noms, sacrés noms...

La version bretonne de cet article, parue en mars 2005, suscite actuellement des commentaires. Je  l'ai donc rééditée, ainsi que la version en français, que voici.

"J’ai commencé à parler breton début 2002 et je découvre, petit à petit, le monde des bretonnants. Commencer à parler une langue, à la lire, à comprendre les gens qui la parlent, à être compris soi-même, est un grand plaisir. Avec la découverte de la langue elle-même, vient la découverte d’un univers, d’une façon de voir le monde, d’une culture qui fut celle de mes ancêtres jusqu’à mes quatre grands-parents.

Mais il y a aussi la découverte, collatérale, des us et coutumes du monde bretonnant. Ainsi, j’ai découvert qu’il fallait “bretonniser” les noms de familles, et donc le mien... J’ai commencé à envoyer des articles en breton à tel ou tel journal, en les signant de mon nom, et j’ai eu la surprise, une fois imprimé, de voir mon patronyme transformé sans qu’on m’ait demandé quoi que ce soit. A la place de Christian Le Meut, j’ai eu droit à du Christian Meut, ou du Christian Ar Meut... Cachez donc ce “Le”, trop français, que nous ne saurions voir... Une revue m’a indiqué que si je voulais continuer à écrire dedans (bénévolement je précise), il fallait “bretonniser” mon nom. Mon nom ne ferait pas assez donc breton : ça alors ! Et comme je suis un peu têtu, j'ai dit non. Non. NON. NANN.

Cristiano El Moto ?
Voilà une vingtaine d’années que j’écris des articles, c’est d’ailleurs mon métier, et certains ont été traduits en espagnol, en allemand, en anglais... Mon nom n’a pas été changé pour autant, pour devenir “Cristiano El Moto” ou “Chris The Meuth”... Mais c’est ainsi dans le monde des bretonnants, si vous avez un petit quelque chose de trop français dans votre nom, il faut le “bretonniser” d’urgence. Et, dans ce sport là, l’injustice est de mise car il en est qui doivent changer leurs noms et d’autres qui n’ont rien à changer dedans...

Mais, si l’on admet ce principe de bretonnisation, comment le mettre en application ? Si je suis Christian Le Meut selon l'Etat civil français, comment traduire cela en breton ? Kristen (équivalent du "Christian" français) ar Maout, Kristen Meut; Kristen Er Meut... “Maout”, signifie “bélier”, en breton vannetais mais, du côté de Crac’h et de Ploemel, près d’Auray, où sont nés mes grands-parents, ont dit plutôt “meuw” que “meut”. Qui donc choisira la meilleure traduction et prononciation ? L’Office de la langue bretonne, l’université de breton de Rennes ou celle de Brest ? Ces professeurs éméritees et spécialistes ne sont pas toujours d’accord entre eux...

Et si l’on bretonnise les noms de familles d’un côté, pourquoi ne pas les franciser de l’autre ? Mon nom de famille signifierait donc “le bélier” ou “le mouton”. Comment choisir ? Selon les dictionnaires, ce mot peut aussi désigner un “champion”, puisqu’un mouton était, et est encore (mais ne le répétez pas à Brigitte Bardot), donné au champion de lutte bretonne ayant gagné un tournoi... “Champion”, ce ne serait pas mal sauf que, comme il est également question de bêtes à cornes, un de mes dictionnaires bretons indique une autre traduction : “cocu”...

Effacer la part française ?
Dur dur, donc, de franciser comme de bretonniser. Les noms de familles, comme ceux de lieux, sont le fruit de longs processus historiques, familiaux, culturels. Si j’en crois le mien, je suis donc d’origine un peu chrétienne du côté de mon prénom, breton du côté de mon nom de famille mais avec une part française... Et c’est tant mieux. Car quelle est donc cette idée de vouloir “bretonniser” les noms, qu’est-ce que cela signifie ? Pourquoi chercher à effacer, à couper, à nier ainsi, une partie de notre identité ? Ce type de procédé a été utilisé contre la langue bretonne pour l’effacer du paysage, et c’est justement une bonne raison de ne pas l’utiliser à nouveau contre, cette fois, notre part française (et nos autres parts !).

Alors comment résoudre le problème ? Et bien en laissant les noms da  familles tels qu’ils sont et en laissant chacun libre des les “bretonniser” ou pas, et de signer à sa guise... Mais, en continuant de chercher, j’ai découvert récemment que mon nom de famille pourrait venir du gaulois, via le breton ! Voilà l’idée : le gaulois étant une langue celte, ancêtre commun à la langue bretonne et à la langue française. Pourquoi ne pas “gauloïser” plutôt les noms de familles ? Mais comment ? Eh bien à la façon d’Astérix, pardi, et c’est signé :

Christianix Le Meutix

Anvioù, sapre anvioù

Ar pennad-se, embannet e miz Meurzh 2005, a laak tud-zo da gomz ha da skriv hiriv an deiz, setu perak en embann a ran en-dro.

"Kroget m’eus da gomz brezhoneg er bloaz 2002 hag e tisoloan tamm ha tamm bed ar vrezhonegerion, bed ar re a gomz "breton", evel ma vez lâret koste An Alré. Me faote diñ komz brezhoneg abaoe pell, har ur blijadur bras eo krogiñ da gompreñ, lenn, ha gomz brezhoneg. Mod-se e teskan, tamm ha tamm, yezh ma zud kozh, hag a oa brezhonegerien a vihan anezhe. Razh. Deskiñ brezhoneg zo ul labour da vat... Met klask da gompreñ bed ar vrezhonegerion zo ivez ul labour, da vat.

Da skouer, kavet m’eus souezhus bras un dra hag a zo, war e seblant, boutin evit ul lod vras ag ar Vrezhonegerion : chañch o anvioù familh evit o brezhonekaat... Kroget m’eus da skrivañ e brezhoneg ha da gas testennoù da gazetennoù-zo... Met chanchet eo bet ma anv, ma sinadur, hep bout goulennet netra genin. E-lerc’h Christian Le Meut, m’eus kavet “Christian Meut”, pe “Christian Ar Meud”, da skouer... Troc’het eo bet al “Le”, a zo re c’halleg evit tud-zo marteze... Hag ur gazetenn da lâr diñ a oa brav ma fennadoù skrid met e oa red chañch ma sinadur evit brezhonekaet anezhan ! Bizkoazh kemend all n’eo ket brezhoneg awalc’h añv ma familh, m'eus sonjet. Met penn kalet on un sort, ha kreskontet m’eus nann. Nann. NANN !

Cristiano El Moto ?
Kazetenner on abaoe 1984. Pennadoù skrivet ganin a zo bet troet e saozneg bleadeù-zo, pe e germaneg, pe e spanoleg... Ha n’eo ket bet troet ma sinadur evit donet da vout “Cristiano El Moto”, pe “Chris The Meuth”... Met, mod-se emañ e bed ar vrezhonegerien, red eo chañch hoc’h anv ma z’eus un nebeut galleg e barzh. Ma n’eus ket, n’ho po ket netra da chañch ! Ha chañch zo aes da lâret met penaos ? Mard on me Christian Le Meut e galleg, penaos e vo troet e brezhoneg. Kristen (Christian e brezhoneg) Ar Maout ? Christian Meut ? Christian ar Meut ? Pe Kristen Er Meut ? Ha perak “meud” ? Koste Krac’h ha Pleñver, e lec’h ma oa ganet ma zud kozh, e vez lâret kentoc’h “meuw”... Get piv e vo choazet ar stum gwellan ? Tud ag Ofis ar brezhoneg ? Pennoù bras ag ar skolioù veur ? Met re a skol-veur Brest, pe re a skol-veur Roazhon ? Sach blev a zo etreze alies !

Gallegaat ?
Ha deomp pelloc’h : mard eo brezhonekaet anvioù familh get brezhonegerion-zo, perak ne vehe ket “gallegaet” o anvioù get gallegerion zo ? Hervez ar pezh m’eus goulennet get ma zud kozh, “Le Meut” a dalv “le bélier”, pe “le mouton”, e brezhoneg gwenedeg; pe ivez, “champion” peogwir e vez roet ur maout d’ar gourener en deus trec'het ar re all : “Aet eo ar maout getan”... Met ar ger se a dalv ivez (a-wezhoù, pas alies elkent), “cocu” e galleg, hervez ar geriadur Favereau... Ma m’behe c’hoant gallegaat me avn, penaos dibab ?

Me, m’eus ket afer na da vrezhonekaat, na da gallekaat ma anv.
Ha me gav souezhus doarieù sort-se. Hanter vreton hag hanter c’halleg eo ma anv, ha kristen ma anv bihan. M’eus ket choazet met mod-se emañ, ha gwell a-se. Perak brezhonekaat anvioù familh ? Roet int bet deomp evel m’emaint, get hon tud. Get hon istor ivez. Me zo me Breizhad, Breton, ha français, hag european, hag ur mab den, ha traoù all c’hoazh. Ur binvidigezh eo. Perak klask da droc’hiñ, traoù hag a zo ul lodenn a ma istoer, ha ma identitelezh ? Traoù sort-se a zo bet graet a enep d'ar brezhoneg : perak oc’h ober en dro a enep d'ar galleg ?

Penaos diskoulmiñ an afer neuze ? Aes eo : lesket anvioù an dud evel m’emaint, ha lakaat pep hini libr da chañch pe pas e anv hervez e sonjoù...

Un dra c'hoazh. Hervez un levr m’eus lennet ar ger “maout” a a zeuhe ag ar yezh komzet get ar C’hallaoued, ar galianeg, hag a oa ur yezh keltiek evel ar brezhoneg. Setu ur sonj vat : galianekaat anvioù familh ! An dra-se a vehe gwelloc’h c’hoazh... Met penaos ? Doare Asterix marteze ? ha setu, chañchet m’eus ma sinadur. N'on ket ken penn kaled, benn ar fin ! Sinet

Christianix Le Meutix"

04/09/2008

Le québécois : langue à part entière ou dialecte du français ?

Mardi dernier je suis allé voir un film québécois, "Les 3 p'tits cochons" de Patrick Huard. L'histoire de trois frères réunis autour de leur mère malade, de leurs vies sentimentales. Très drôle, un peu cru. Le film était donc un en français, logique, puisque l'on parle français au Québec (et d'autres langues), mais une bonne partie était sous-titrée.... en français de France ! Et ce n'était pas inutile pour comprendre quelques passages des dialogues. "Je ne vais pas me faire pogner" dit l'un des personnages pour "je ne vais pas me faire attraper" (il a le projet de tromper sa femme...). "Hostie", "tabernacle" sont manifestement grossiers en québécois.

Il y a quelques années un autre film québécois (assez drôle lui aussi), CRAZY, était partiellement sous-titré en français...

Aux gens qui, comme moi, parlons et militons pour les langues régionales, leur reconnaissance officielle en France par exemple, il est souvent opposé que nos langues régionales ne seraient pas unifiées, qu'elles comportent des dialectes, des sous-dialectes, ce qui est vrai. Mais c'est vrai pour toutes les langues, officielles ou pas. Alors le québécois est-il devenu une autre langue ? Est-ce encore du français, ou un dialecte du français ? 

Christian Le Meut 

Kebekeg : galleg, pe ur yezh all ?

15a8692e93b050bf7d9938a5db43fcc9.jpgDimeurzh paseet m'eus gwelet er sinema ur film a Vro Gebek : "Les 3 p'tits cochons", savet get Patrick Huard. Istor tri breur hag o darempredoù get ar maouezed... Fentus bras ar film hag a oa istitlet e galleg ! Drol eo, iskiz eo, ur film e galleg istitlet e galleg. Rak, hervez ar pezh a m'eus lennet e pep lec'h, komzet vez galleg e Bro gKebek, pas ? Yezh ofisiel ar vro-se eo. E gwirionez, ne oa ket istitlet penn da benn, met a wezhoù hepken, ha talvoudus a oa kar ar C'Hebekiz a zo diaes da gompreñ memestra.

"J'vais pas faire pogner" a dalv, da skouer, "ne vin ket tapet" (laret get unan ag ar vreudeur, dimezeet met dedennet bras get ur vaouez all). "Tabernak" ha "Hostie" a zo gerioù groñs.

Un nebeut bleadeù a zo, ur film all a Vro gKebek a oa bet hanter istitlet ivez : CRAZY. Mechal memestra mard eo ar c'hebekeg deuet da vout ur yezh all distaget ag ar galleg ?

Skeudenn tennet ag ar gazetenn Studio 

23/08/2008

Mescladis e cops de gula

Pennadoù interesus bras a zo da lenn war al lec'hienn "Mescladis e cops de gula" (galleg-okitaneg), hiriv an deiz : a zivout an okitaneg, lezenn stur Bro c'hall hag ar yezhoù rannvroel, istor ar galleg hag ar mojennoù savet tro dro an istor Se (Villers Cotterêt). Hir int, ar pennadoù skrid, a wezhoù, met talvout a ra ar poan d'o lenn.

Il y a actuellement plusieurs articles très intéressants à lire sur le site "Mescladis e cops de gula" (occitan-français) : sur l'occitan, la Constitution française et les langues régionales, l'histoire du français et les mythes construit autour (Villrrs-Cotterêt). Des articles parfois loin mais qui valent le coup d'être lus :

http://taban.canalblog.com/ 

16/07/2008

Vassilis Alexakis dans Marianne : "on développe une vision policière de la langue"

4fc93736928959e509acc4581b81bb1b.jpgL'hebdomadaire Marianne, dans son numéro du 5 au 11 juillet dernier, n° 585, publie un entretien très intéressant avec l'écrivain grec Vassilis Alexakis. Né en 1943, il s'est réfugié en France lors de la dictature des colonels. Il écrit ses romans en grec et en français et a reçu en 2007 le prix de l'Académie française, ce qui ne signifie pas qu'il est d'accord avec elle sur les langues régionales. L'entretien porte sur l'identité et la fameuse fumeuse "exception" française...

"Loin de toute fixité, l'identité d'une nation est mouvante, explique Alexakis. Sinon, elle se caricature elle-même. C'est précisément ce qui me préoccupe. La France officielle tend à se caricaturer. (...)."

"Quelle forme prend cette caricature ?" demande Alexis Lacroix, de Marianne : "Une langue, à mes yeux, n'appartient à aucun Etat nation. Car une langue se nourrit essentiellement du dialogue qu'elle noue avec d'autres. C'est vrai du grec, qui charrie nombre d mots issus des langues parlées avant son apparition, dans l'espace nationale héllénique. Ainsi les mot "Athènes" ou encore "Olympe" ne sont pas grecs... Mais ce qui est vrai du grec l'est aussi du français, langue deux fois latine, et qui a intégré une foule de mots étrangers".

Marianne : "Un des marqueurs de l'exception française, c'est justement la place accordée à la langue (...) ?

V.A. : "Bien sûr, mais il ne faut pas pour autant se représenter la langue française comme une grosse armoire normande. La langue française n'a pas de propriétaire. Un Chinois qui connaît bien cette langue - il y en a un à l'Académie française - a autant de droit sur le français que n'importe quel Français dont les ancêtres ont vécu sur le sol de l'Hexagone depuis dix-sept siècles ! Pratiquant dans mon oeuvre un va-et-vient permanent entre le français et le grec, j'éprouve de la joie à écrire dans une langue qui n'est pas ma langue maternelle ; en même temps, je m'alarme que les politiques dénaturent aussi la langue, en faisant jouer au français un rôle détestable de pierre de touche de l'identité française. Ils dénaturent la langue quand ils l'utilisent comme un instrument pour baîllonner les langues régionales. Au nom de l'unité, en s'appliquant à supprimer le corse, le basque, le breton ou l'occitant, on a en fait nui au français, et à son rayonnement.

Marianne : "C'est un des traits de l'exception française : l'extrême centralisation linguistique...(1) 

V.A. : "Sans doute, mais à rebours de ce qu'on a cru longtemps, les langues régionales possèdent d'immenses ressources pour nourrir le français. Quand la France s'applique à faire jouer un rôle de carte d'identité ou de douanier au français, on développe une vision policière de la langue. La meilleure façon de défendre aujourd'hui les couleurs de la langue française - et la plus fidèle à l'esprit de son "exception" - c'est de promouvoir les droits de l'homme. Aussi, en déroulant un tapis rouge à quelqu'un comme Kadhafi, notre pays s'est tourné en dérision. (...).

(1) Note du blogueur en chef : Qu'est-ce donc qu'une "centralisation linguistique" ? Le journaliste de Marianne semble ignorer que la France s'est construite sur une réalité plurilingue, depuis des siècles. Il est vrai que ce n'est pas dans son propre journal qu'il pourra beaucoup s'informer sur cette réalité...

 

10/07/2008

Langues régionales : suite du feuilleton

Ma faota deoc'h heuliañ an dabutoù a zo bet an noz-mañ er Vodadeg vroadel a ziar-benn ar yezhoù rannvroel el lezenn stur (Bonreizh), kit war lec'hienn Oui au breton. A-benn ar fin, lakaet int bet er pennard 75, ar lerc'h bout lakaet er pennad kentañ. N'eo ket gouniet, neozh, rak an tu kleiz (PS/PC) o deus votet a-enep ar raktres lezenn a-bezh...

http://ouiaubreton.com/spip.php?article5068

Si vous voulez suivre les débats qui ont eu lieu cette nuit à l'Assemblée nationale sur les langues régionales et leur place dans la Constitution, allez sur le site Oui au breton. Finalement, elles sont mentionnées dans l'article 75 après avoir été insérées dans l'article 1. Ce n'est pas gagné pour autant, car le PS et le PC ont voté contre l'ensemble du projet de loi de modification de la Constitution...

20/06/2008

Sénat : petits commentaires sur un débat

Le refus du Sénat de modifier la Constitution afin d'y accorder une place aux langues régionales ne clôt pas le débat : les députés porteurs du projet à l'Assemblée nationale reviendront à la charge, qu'ils soient socialistes (Mme Lebranchu), ou UMP (Le Fur). Le parlement, réunion du Sénat de de l'Assemblée, se réunira en juillet et c'est seulement après le vote final de modification de la Constitution que l'on pourra tirer des conclusions de cet épisode parlementaire. Pour l'instant, un aspect positif, me semble-t-il, est que ce débat met les langues régionales en discussion en France, ce qui n'a pas été le cas depuis longtemps. Nous passons d'un stade de non-existence, d'ignorance, de non-débat, voire de mépris, à un stade de prise en compte. C'est une avancée, même si certains propos tenus sont désagréables.

Et l'Europe ? 
J'observe cependant que des vieux clichés ont toujours cours, notamment celui de porter le discrédit sur les langues régionales en niant le fait qu'elles soient des langues (lire ci-dessous les propos du sénateur Autain, de Loire-Atlantique). Certains sénateurs ont montré leur profonde ignorance sur la question des langues. J'observe aussi, dans les discours de nos élus, qu'ils soient sénateurs ou députés, l'absence totale de prise en compte de ce qui se passe en Europe. Robert Badinter craint, par exemple, que l'amendement en question ne permette l'adoption de la Charte européenne des langues minoritaires. Celle-ci a pourtant été signée par... Lionel Jospin, alors  premier ministre, avec moultes précautions (1) ! Entre socialistes, ils n'ont pas l'air de s'entendre.

Or cette charte est en application depuis des années maintenant dans une vingtaine de pays d'Europe. Quelles difficultés cela pose-t-il ? Est-elle un facteur d'intégration ou, au contraire, de tension ? Fait-elle avancer les droits de l'Homme ? Notamment pour les populations qui, dans certains Etats, ne parlent pas la ou les langues officielles ? On n'en saura rien, à écouter nos élus du peuple... Ni non plus, dans la presse, à ce que je peux en lire. On ressasse, par contre, les vieilles peurs comme l'a dit, fort justement, le sénateur David Assouline. Quant à l'intérêt du bilinguisme précoce à l'école : quasiment ignoré (2).

La place du français
Même chose pour la place du français. Robert Badinter encore, a pointé la place essentielle du français dans la construction de la France. Là encore, aucun recul, aucune prise de distance : l'imposition d'une langue unique pour construire une nation est-elle un moyen juste, suffisant, pour bâtir une société démocratique et respectueuse des droits de l'Homme ?  Un Etat est-il en droit d'imposer une éducation dans une autre langue que la langue maternelle, comme celà s'est fait en France, et en cherchent à éradiquer ces langues maternelles ?  Pas de réponse. Par contre, des sénateurs se sont moqués d'un récent rapport du Comité économique et social de l'ONU pointant les manquements de la France par rapport aux minorités linguistiques.

L'insistance de M. Mélenchon
Enfin, j'ai noté l'insistance de M. Mélenchon à affirmer que la France n'opprime pas les langues régionales. Une telle insistance est suspecte ! M. Mélenchon base-t-il cette affirmation sur des faits, ou s'agit-il seulement d'un argument de propagande ? Il dit avoir été insulté par des partisans des langues régionales. Si c'est le cas, c'est dommage. L'insulte personnelle est contraire à l'esprit démocratique. Mais quand il traite l'association Diwan de "secte", comme il l'a fait lors d'un débat récent au Sénat, M. Mélenchon cherche-t-il à apaiser le débat ? Mais, a-t-il expliqué, qu'il "parlait à son voisin"... Suffisamment fort toutefois pour être entendu et pris en compte par les secrétaires du Sénat. 

La suite au prochain débat, car il y en aura d'autres.

Kenavo deoc'h !

Christian 

(1) Sur les précautions prises par le gouvernement Jospin lors de la signature de cette Charte (finalement retoquée par le Conseil constitutionnel et non ratifiée), voir le site du Conseil de l'Europe :

http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ListeDeclaration...

(2) Lire également sur le site Oui au breton, cet éloge du bilinguisme scolaire précoce :

ttp://ouiaubreton.com/spip.php?article4847 

  

19/06/2008

Sénat : contre les langues régionales dans la Constitution

Dec'h ar senadourion o deus votet a-enep chañch bonreizh Bro-Frans evit anavezout ar yezhoù rannvroel, ar pezh a zo dipitus. Lâret traoù eo bet a-dreuz get senadourion a zo, evel da gustum, hag ivez get tud a-Vreizh, evel ar pezh a zo bet lâret get ur senadur a Liger Atlantel François Autain. Razh ar senadourion n'int ket yezhourion, pell a zo !

Hier les sénateurs ont donc voté contre le fait que la Constitution française reconnaisse officiellement les langues régionales, ce qui constitue une déception. Certains sénateurs ont montré leur méconnaissance du sujet, notamment ce député socialiste de... Loire Atlantique, François Autain. Les sénateurs ne sont pas des tous des linguistes, loin s'en faut ! M. Autain oublie de mentionner, parmi les dialectes du breton, celui de Guérande, proche du vannetais, qui se parlait dans son département il y a moins d'un siècle. Les bretonnants guérandais allaient vendre leur sel dans le Morbihan et jusqu'au Finistère nord, et parvenaient à se faire comprendre, en breton de leurs compatriotes, démontrant ainsi qu'il y a bien une seule langue bretonne avec des dialectes. Je note également que dans son intervention, M. Autain ne propose rien, il ne fait que démolir en se basant sur des connaissances pour le moins partielles. Dommage, pour un élu du peuple, de si mal connaître une langue du peuple.

"M. François Autain (sénateur de Loire-Atlantique - rattaché au groupe communiste). "- Je souhaiterais attirer l’attention sur l’utilisation inappropriée qui est faite de l’expression « langue régionale » ; ne rendant pas compte de la diversité des parlers qui existent dans une même région, elle contribue à l’appauvrissement de notre patrimoine linguistique.

Élu d’un département dont l’identité bretonne est toujours incertaine, je prendrai l’exemple des parlers pratiqués en Bretagne. Il n’existe pas une langue régionale unique mais un nombre important de parlers rattachés à cinq grands dialectes. Dans la région rennaise, on pratique le gallo, qui est un dialecte de langue d’oïl parlé en Bretagne orientale ; dans le reste de la Bretagne, dite Bretagne bretonnante, on dénombre quatre dialectes celtiques : le trégorois, le vannetais, le léonard et le cornouaillais. Et chaque dialecte se décompose en sous-familles, celles-ci étant si diverses que les linguistes ne se réfèrent qu’aux parlers qui les composent. Au sein du cornouaillais, on distingue ainsi les parlers du pays Bigouden, du Poher, du Cap Sizun ou encore du pays de l’Aven.

Les choses se compliquent encore si l’on considère qu’à l’intérieur même de ces zones, il existe des sous-dialectes spécifiques. Ainsi, le sous-dialecte du pays Bigouden diffère entre les locuteurs de Quimper et de ses alentours et ceux de la région de Douarnenez.

En organisant la promotion des langues régionales en Bretagne par le biais des écoles bilingues, qui enseignent une forme d’esperanto composé des différents parlers bretons, incompréhensible par ceux qui ont l’un de ceux-ci pour langue maternelle, on contribue à la liquidation d’un patrimoine linguistique bien plus riche dans la réalité que dans la description sommaire que je viens d’en faire. Je rappelle par parenthèse que cet esperanto breton a été inventé en 1941 par un admirateur du régime nazi.

Pour toutes ces raisons, les langues régionales ne doivent pas figurer dans la Constitution."