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20/06/2008

Sénat : petits commentaires sur un débat

Le refus du Sénat de modifier la Constitution afin d'y accorder une place aux langues régionales ne clôt pas le débat : les députés porteurs du projet à l'Assemblée nationale reviendront à la charge, qu'ils soient socialistes (Mme Lebranchu), ou UMP (Le Fur). Le parlement, réunion du Sénat de de l'Assemblée, se réunira en juillet et c'est seulement après le vote final de modification de la Constitution que l'on pourra tirer des conclusions de cet épisode parlementaire. Pour l'instant, un aspect positif, me semble-t-il, est que ce débat met les langues régionales en discussion en France, ce qui n'a pas été le cas depuis longtemps. Nous passons d'un stade de non-existence, d'ignorance, de non-débat, voire de mépris, à un stade de prise en compte. C'est une avancée, même si certains propos tenus sont désagréables.

Et l'Europe ? 
J'observe cependant que des vieux clichés ont toujours cours, notamment celui de porter le discrédit sur les langues régionales en niant le fait qu'elles soient des langues (lire ci-dessous les propos du sénateur Autain, de Loire-Atlantique). Certains sénateurs ont montré leur profonde ignorance sur la question des langues. J'observe aussi, dans les discours de nos élus, qu'ils soient sénateurs ou députés, l'absence totale de prise en compte de ce qui se passe en Europe. Robert Badinter craint, par exemple, que l'amendement en question ne permette l'adoption de la Charte européenne des langues minoritaires. Celle-ci a pourtant été signée par... Lionel Jospin, alors  premier ministre, avec moultes précautions (1) ! Entre socialistes, ils n'ont pas l'air de s'entendre.

Or cette charte est en application depuis des années maintenant dans une vingtaine de pays d'Europe. Quelles difficultés cela pose-t-il ? Est-elle un facteur d'intégration ou, au contraire, de tension ? Fait-elle avancer les droits de l'Homme ? Notamment pour les populations qui, dans certains Etats, ne parlent pas la ou les langues officielles ? On n'en saura rien, à écouter nos élus du peuple... Ni non plus, dans la presse, à ce que je peux en lire. On ressasse, par contre, les vieilles peurs comme l'a dit, fort justement, le sénateur David Assouline. Quant à l'intérêt du bilinguisme précoce à l'école : quasiment ignoré (2).

La place du français
Même chose pour la place du français. Robert Badinter encore, a pointé la place essentielle du français dans la construction de la France. Là encore, aucun recul, aucune prise de distance : l'imposition d'une langue unique pour construire une nation est-elle un moyen juste, suffisant, pour bâtir une société démocratique et respectueuse des droits de l'Homme ?  Un Etat est-il en droit d'imposer une éducation dans une autre langue que la langue maternelle, comme celà s'est fait en France, et en cherchent à éradiquer ces langues maternelles ?  Pas de réponse. Par contre, des sénateurs se sont moqués d'un récent rapport du Comité économique et social de l'ONU pointant les manquements de la France par rapport aux minorités linguistiques.

L'insistance de M. Mélenchon
Enfin, j'ai noté l'insistance de M. Mélenchon à affirmer que la France n'opprime pas les langues régionales. Une telle insistance est suspecte ! M. Mélenchon base-t-il cette affirmation sur des faits, ou s'agit-il seulement d'un argument de propagande ? Il dit avoir été insulté par des partisans des langues régionales. Si c'est le cas, c'est dommage. L'insulte personnelle est contraire à l'esprit démocratique. Mais quand il traite l'association Diwan de "secte", comme il l'a fait lors d'un débat récent au Sénat, M. Mélenchon cherche-t-il à apaiser le débat ? Mais, a-t-il expliqué, qu'il "parlait à son voisin"... Suffisamment fort toutefois pour être entendu et pris en compte par les secrétaires du Sénat. 

La suite au prochain débat, car il y en aura d'autres.

Kenavo deoc'h !

Christian 

(1) Sur les précautions prises par le gouvernement Jospin lors de la signature de cette Charte (finalement retoquée par le Conseil constitutionnel et non ratifiée), voir le site du Conseil de l'Europe :

http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ListeDeclaration...

(2) Lire également sur le site Oui au breton, cet éloge du bilinguisme scolaire précoce :

ttp://ouiaubreton.com/spip.php?article4847 

  

Commentaires

Très juste, ce que vous dites.
J'aurais pas dit mieux.

Sur melenchon, on sait ce qu'on doit en penser. Et badinter devait aussi le savoir. Comme sur charasse. Pauvre badinter.

Écrit par : Alwenn | 20/06/2008

Les commentaires sont fermés.