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01/09/2010

Léon Werth (1878 - 1955) : une émission sur France Inter

Tombé dans les oubliettes de l’histoire, l’écrivain et journaliste Léon Werth mérite que l’on en ressorte d’urgence. Les oeuvres de cet esprit libre, témoin de deux guerres, sont rééditées chez Viviane Hamy... Et, chose rare, une émission vient de lui être consacrée sur France inter (le 31 août), à l'occasion d'une exposition qui se tient actuellement à Issoudun. Voici le lien, l'émission reste écoutable pendant 30 jours, chercher dans "archives".

http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/humeurvagabonde/

Et, du coup, je réédite une note publiée en 2006 :

Peut-être avez-vous lu “Le petit prince” de Saint-Exupéry... L’auteur dédie son livre à un de ses amis : Léon Werth, et plus précisément, puisque “Le petit prince” est un livre pour enfants, “A Léon Werth quand il était petit garçon”... Le petit prince a été édité pour la première fois aux Etats-Unis, et en 1943. Saint-Exupéry y était réfugié, avant de revenir combattre pour la libération de la France, et son ami Léon Werth vivait reclus dans une maison du Jura. Cet intellectuel français d’origine juive risquait d’être raflé et déporté à tout moment. La dédicace prend donc une dimension singulière. Saint Exupéry ne survit pas à la guerre, il est tué en août 1944. Il ne verra pas son Petit prince édité en France, en 1946. Léon Werth, lui, vit jusqu’en 1955, inconsolable de la disparition de son meilleur ami. Mais si la mémoire de Saint-Exupéry est restée vivante, celle de Léon Werth a été oubliée pendant des décennies. Pourtant l’oeuvre et le parcours de ce journaliste écrivain méritent d’être connues.

Léon Werth est né en 1878 à Remiremont, dans les Vosges. Ses études l’amènent à Paris où il devient le secrétaire de l’écrivain Octave Mirbeau. Journaliste et critique artistique, Werth se fait connaître par ses livres sur des peintres comme Puvis de Chavannes et Cézanne et son premier roman, la Maison blanche, est proche de remporter de prix Goncourt. Il y narre son séjour en clinique, en 1911, pour soigner une otite aiguë contractée en Bretagne. Il brosse dans ce livre un tableau incisif du monde médical et y décrit la relation du malade à sa maladie.

Un antipatriote engagé volontaire
Proche des mouvements pacifistes d’avant guerre, notamment de Gustave Hervé, antipatriote et antimilitariste, il s’engage néanmoins en août 1914 : “Tout homme qui s’échappe des circonstances est lâche”, écrira-t-il en 1930. Envoyé sur le front, il est réformé en août 1915 pour maladie. Il décrit sa vie de soldat dans “Clavel soldat” et “Clavel chez les majors”, deux “déclarations de guerre à la guerre” écrit son biographe Gilles Heuré dans une biographie intitulée “L’insoumis” sortie début 2006 chez Viviane Hamy. Ces deux livres sont salués par la critique, notamment par Henri Barbusse, mais racontent la guerre de l’intérieur, très loin des épopées lyriques et des discours officiels.

Durant les années 20, Léon Werth publie beaucoup. Il est un des intellectuels de gauche en vue. Proche des communistes et des anarchistes, mais membre d’aucun parti, il suscite la méfiance. Quand ce journaliste veut partir en URSS en reportage, en 1923, les autorités soviétiques lui refusent l’entrée dans le pays. Il reste à la porte, en Pologne, malgré les chaudes recommandations de responsables communistes français. Dehors, M. le journaliste. Le regard de cet esprit libre aurait desservir la propagande.

Dénonciation du colonialisme
Trois ans plus tard le citoyen Werth se rend en Cocinchine, et en rapporte un témoignage critique de la colonisation : “Tout Français qui n’appartient pas à la race coloniale revient d’Indochine avec un sentiment de honte”, écrit-il dans son livre-reportage. Nous sommes en 1926. Aucun bilan positif de la colonisation pour Léon Werth.

Il continue de publier reportages et romans, critiques cinématographiques et picturales, mais les années 30 sont plus difficiles. Ses critiques du communisme et sa liberté de pensée, son ton souvent sarcastique, l’isolent d’une partie du monde littéraire. Certains de ses manuscrits sont refusés par des maisons d’édition: “Vous êtes un homme seul et votre pensée, par la même, devient très difficile à définir. Je crains fort que le lecteur ne puisse vous suivre et qu’il ne trouve pas dans ce recueil ce qu’on appelle communément, un message” lui répond l’éditeur Denoël...

La rencontre avec Saint-Exupéry
C’est en 1935 que Léon Werth et Antoine de Saint-Exupéry font connaissance. Le second est de 22 ans le cadet du premier, mais les deux hommes sympathisent et deviennent des amis intimes. Werth et sa femme vont rendre visite à Saint-Exupéry dans la caserne où il est mobilisé, à Saint-Dizier, en 1939. La défaite surprend Léon Werth à Paris. Il décide de quitter la capitale avant l’arrivée des Allemands, mais se trouve coincé sur les routes de la débâcle, avec son épouse et leur employée... Il met “33 jours” à atteindre leur maison du Jura, voyage que Léon Werth raconte dans un témoignage publié sous ce titre (Ed. Viviane Hamy et Magnard pour les collégiens). Un voyage terrifiant et étonnant. Werth y montre la veulerie de certains Français qui accueillent les envahisseurs à bras ouverts. Comment les mêmes profitent de la débâcle mais comment d’autres, notamment des fermiers de la région de Montargis, secourent leurs prochains...

Arrivé dans le Jura, à Saint-Amour, Léon Werth est contraint d’y rester. La zone libre est plus sûre pour les personnes d’origine juive comme lui, même s’il doit, le 9 juillet 1941, aller se déclarer “Juif” à la préfecture de Lons-le-Saunier : “Je me sens humilié, non pas d’être juif, mais d’être présumé, étant juif, d’une qualité inférieure”... Il reste jusqu’en janvier 1944 à Saint-Amour, reclus, bougeant peu, attendant les visites de son fils et de sa femme, retournée à Paris et qui traverse la ligne de démarcation clandestinement.

Un observateur au regard aiguisé
Dans son réduit jurassien, Werth se fait observateur du monde. Avec son regard aiguisé, caustique mais également humain et tendre, il écrit son journal quotidien qui sera publié, après la guerre, sous le titre “Déposition”. Un témoignage incontournable sur l’état de l’opinion en France “libre” puis occupée. Les turpitudes de la vie quotidienne, les rumeurs du bourg de Saint-Amour, les propos des paysans, les émissions de radio Londres, radio Paris ou de la radio suisse. Il note l’impopularité de Laval et la popularité de Pétain. Celle de De Gaulle aussi, qui croît au fil du temps. Il lit la presse de la résistance et, dès 1943, mentionne l’existence d’Auschwitz, en Pologne.

“Victoires défensives”
Les mentalités évoluent en fonction des batailles. Léon Werth notent les astuces de la propagande allemande. Après Stalingrad, les armées allemandes reculent partout en Europe de l’Est et en Afrique du Nord. Il ne s’agit pas de défaites, non, mais de “victoires défensives” selon la propagande. Belles victoires défensives en vérité, jusqu’à la prise de Berlin par l’Armée rouge ! La propagande récente a su créer des métaphores tout aussi manipulatrices : “frappes chirurgicales”, “dommages collatéraux”...

L’immobilisme sied mal à Léon Werth : “Mon pays n’est pas ici, écrit-il, mon pays c’est la Bretagne”. Léon Werth aimait les voyages et, semble-t-il, appréciait particulièrement la Bretagne. De retour à Paris en janvier 1944, Werth livre un témoignage émouvant sur les derniers jours de l’occupation. D’autant plus émouvant que la nouvelle de la disparition de Saint-Exupéry lui parvient. Après la Libération il assiste, en tant que journaliste, au procès du maréchal Pétain. Malgré les millions de morts, Léon Werth ne cède pas à la haine : aucun trace dans ses ouvrages. De la colère, oui, pas de haine. Il reste profondément humain malgré ses coups de griffe. Jusqu’à sa fin, en 1955.

“Werth enseigne à vivre” écrivait Saint-Exupéry sur l’oeuvre de son ami. Les livres de Léon Werth continuent “d’enseigner à vivre” au XXIe siècle.
Christian Le Meut

Les livres de Léon Werth sont réédités chez Viviane Hamy. "33 jours" a été édité en poche en 2002, chez Magnard, pour les collégiens.

17/02/2009

BT : Aya de Yopougon

Aya4345.jpg

Yopougon a zo ur c'harter ag Abidjan, e Aodoù an Olifant. Aya a zo ur verc'h yaouank, etre triwec'h hag ugent vloaz, a zo e chom barzh ar c'harter-se get he familh, e fin ar ar bleadoù 1970. Ur verc'h fur, seder, sirius, koant, a faota dezhi dont da vout medisinourez. Ha studial a ra kalz evit ar pal-se, ar pezh a zisplij d'he zad Ignace; hennezh a gav ker ar studioù. An tad a labour barzh ur stal a werzh bier, ur bier brudet er vro hag anvet "Solubra"; n'eo ket paeet fall met... div familh en deus, unan ofisiel hag unan all kuzhet, ar pezh a goust argant memestra.

Aya deus ur bochad mignonned ha, dreist holl, Bintou hag Adjoua. Istor teir familh ag ar merc'hed-se a zo displeget deomp, d'un doare farsus awalc'h d'ar peurliesan, met kriz ivez a wezhoù. Er pevarved albom, embannet e fin ar bloaz paseet, e wellomp penaos Aya a zo lakaet diaes get ur c'helener dezhi hag a faota mont da gousked ha c'hoari koukoug geti. Aya deus kaset anezhan da sutal met fallgountant eo ar c'helenner, ha reiñ a ra notennoù fall da Aya. Honnezh a gompren ivez penoas ur bochad studierezed all o deus asantet mont get ar c'helenner... Met, sikouret get Binto hag Adjoua, Aya a gavo un diskoulm, sur awalc'h, er pempved albom...

Aya de Youpogon a ziskouezh penaos a gerzhe an darempredoù sokial e Aodoù an Olifant d'ar c'houlz-se ha, marteze n'o deus ket chanchet kalz, daoust d'ar brezel a zo bet er vro-se war lerc'h. Darempredoù etre ar baotred hag ar merc'hed, ar maouezed hag ar wazed; etre ar re binvidik hag ar re baour (Yopougon a zo ur c'harter paour awalc'h)... Penaos e vez merc'hetaet, penaos e vez paotretaet ? Adjoua a zo e toug: piv e an tad ? Félicité, ur verc'h yaouank, a zo e chom get familh Aya abaoe pell, ur geniterv pell eo ha labour tamm pe damm evel matezh. Un deiz, he zad ha c'houlenn geti da zont en dro d'er gêr, war er maezioù, dre ret. Setu Felicité spontet ha glac'haret, kaset pell ag he familh gwir. Innoncent, ur mignon da Aya, perrukener a vicher, a ya kuit ag ar vro evit mont da Bariz. Ar paotr-se a gar ur baotr all, dre guzh, ha ne faota ket dezhan mont kuit getan... Trist bras, Innocent a ya kuit memestra met, ur wezh degouezhet e Pariz, n'eo ket aes ar vuhez kennebeut. Stard tre, ne lâran ket.

ayadaou319.jpg

Un dra all a zo diverrus bras get "Aya da Yopougon" : ar galleg komzet get an dud a zo evel ar galleg komzet e Aodoù an Olifant,  get ur bochad  gerioù dishenvel, tennet, marteze, ag ar yezhoù all komzet er vro.  Ur geriaoueg a zo e fin pp levr; setu, un nebeut skouerioù :

- Walaï : M'en Doue.
- Les gos : ar merc'hed.
- Toubabousé : "gober evel an Europeaned, europeaniset".
- Le farotage : Foenviñ.
- En kataclando : dre guzh.
- Le pointeur : ar galant, an dousig, ar paotr...
Ha c'hoazh...

- Aya da Yopougon, lodenn 1, 2, 3, 4 a zo bet embannet get Gallimard, rummad "Bayou", skrivet get Marguerite Abouet ha treset get Clément Oubrerie. War dro 16 € an tamm.

Christian Le Meut

E galleg/En français : petite note sur la bande dessinée Aya de Yopougon, dont le quatrième tome est sortie fin 2008, et que je recommande (bientôt la note en français).

16/07/2008

Vassilis Alexakis dans Marianne : "on développe une vision policière de la langue"

4fc93736928959e509acc4581b81bb1b.jpgL'hebdomadaire Marianne, dans son numéro du 5 au 11 juillet dernier, n° 585, publie un entretien très intéressant avec l'écrivain grec Vassilis Alexakis. Né en 1943, il s'est réfugié en France lors de la dictature des colonels. Il écrit ses romans en grec et en français et a reçu en 2007 le prix de l'Académie française, ce qui ne signifie pas qu'il est d'accord avec elle sur les langues régionales. L'entretien porte sur l'identité et la fameuse fumeuse "exception" française...

"Loin de toute fixité, l'identité d'une nation est mouvante, explique Alexakis. Sinon, elle se caricature elle-même. C'est précisément ce qui me préoccupe. La France officielle tend à se caricaturer. (...)."

"Quelle forme prend cette caricature ?" demande Alexis Lacroix, de Marianne : "Une langue, à mes yeux, n'appartient à aucun Etat nation. Car une langue se nourrit essentiellement du dialogue qu'elle noue avec d'autres. C'est vrai du grec, qui charrie nombre d mots issus des langues parlées avant son apparition, dans l'espace nationale héllénique. Ainsi les mot "Athènes" ou encore "Olympe" ne sont pas grecs... Mais ce qui est vrai du grec l'est aussi du français, langue deux fois latine, et qui a intégré une foule de mots étrangers".

Marianne : "Un des marqueurs de l'exception française, c'est justement la place accordée à la langue (...) ?

V.A. : "Bien sûr, mais il ne faut pas pour autant se représenter la langue française comme une grosse armoire normande. La langue française n'a pas de propriétaire. Un Chinois qui connaît bien cette langue - il y en a un à l'Académie française - a autant de droit sur le français que n'importe quel Français dont les ancêtres ont vécu sur le sol de l'Hexagone depuis dix-sept siècles ! Pratiquant dans mon oeuvre un va-et-vient permanent entre le français et le grec, j'éprouve de la joie à écrire dans une langue qui n'est pas ma langue maternelle ; en même temps, je m'alarme que les politiques dénaturent aussi la langue, en faisant jouer au français un rôle détestable de pierre de touche de l'identité française. Ils dénaturent la langue quand ils l'utilisent comme un instrument pour baîllonner les langues régionales. Au nom de l'unité, en s'appliquant à supprimer le corse, le basque, le breton ou l'occitant, on a en fait nui au français, et à son rayonnement.

Marianne : "C'est un des traits de l'exception française : l'extrême centralisation linguistique...(1) 

V.A. : "Sans doute, mais à rebours de ce qu'on a cru longtemps, les langues régionales possèdent d'immenses ressources pour nourrir le français. Quand la France s'applique à faire jouer un rôle de carte d'identité ou de douanier au français, on développe une vision policière de la langue. La meilleure façon de défendre aujourd'hui les couleurs de la langue française - et la plus fidèle à l'esprit de son "exception" - c'est de promouvoir les droits de l'homme. Aussi, en déroulant un tapis rouge à quelqu'un comme Kadhafi, notre pays s'est tourné en dérision. (...).

(1) Note du blogueur en chef : Qu'est-ce donc qu'une "centralisation linguistique" ? Le journaliste de Marianne semble ignorer que la France s'est construite sur une réalité plurilingue, depuis des siècles. Il est vrai que ce n'est pas dans son propre journal qu'il pourra beaucoup s'informer sur cette réalité...

 

07/01/2008

Langues régionales : matière à lire

Bez ez eus danvez da lenn, e galleg, a zivout ar yezhoù rannvroel e Frans, war lec'hienn internet ur c'helenner skol veur (e Bro Okitania, war e seblant), Jean-Pierre Cavaillé.Testennoù hir ha talvoudus.

Il y a matière à lire sur le thème des langues régionales en France, en français, sur le site internet d'un universitaire, Jean-Pierrre Cavaillé (enseignant en Occitanie semble-t-il).

http://taban.canalblog.com/

15/06/2007

Langue bretonne : apprenons plutôt l'anglais ?

Lu dans Le Télégramme, édition de Lorient de jeudi 14 juin cette réponse de la candidate UMP, Maria Colas, à la question des journalistes :

"Que pensez-vous de l'enseignement bilingue ?

- Français-anglais ?

-Non, français-breton. 

- Ce n'est peut-être pas une priorité lorsque les parents et les grands-parents ne parlent plus la langue. Mais il faut pouvoir maîtriser l'anglais et une deuxième langue étrangère au bac, pour envisager un avenir professionnel".

On l'interroge sur le breton, elle répond sur l'anglais... Pourtant ça commençait bien, la dame se prononçant pour le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne, mais l'enseignement de la langue bretonne (parlée en Loire-Atlantique dans la région de Guérande, jusqu'au début du XXe siècle), ne semble pas la préocuper. Pourtant, il y a des écoles bilingues dans sa future circonscription, si elle est élue, et des associations travaillant pour la langue et la culture bretonne... C'est quand même étonnant de ne voir envisager l'apprentissage d'une langue qu'à travers un "avenir professionnel". Et l'enrichissement culturel personnel dans une région où la langue bretonne est la langue d'origine d'une grande partie de la population, la langue qui a donné les noms de lieux, ça ne compterait pas ? Et, si on creuse un peu, il y a encore beaucoup de parents et grands-parents qui parlent le breton, ou en ont des notions...

En terme d'emplois, il y en aurait actuellement un millier d'emplois, en Bretagne, dans le secteur de la langue bretonne. Principalement dans le domaine de l'enseignement. Connaître le breton est donc de plus en plus un atout professionnel pour qui veut vivre en Bretagne. Mme Colas le sait-elle ?

Dans sa réponse la candidate socialiste, Françoise Olivier-Coupeau, rappelle que la région Bretagne a établi, dans son contrat de plan, un "volet additionnel pour l'enseignement du breton", qui n'a pas été signé par l'Etat. Cette candidate tente de succéder au président de la région, Jean-Yves Le Drian, PS lui aussi. Elle est en ballotage favorable pour le second tour.

Rennes : la Caf refuse une subvention aux enfants bilingues
Plus loin dans la page en langue bretonne (p. 49, toutes éditions), le lecteur apprend que la Caisse d'allocations familiales d'Ille-et-Vilaine vient d'annoncer la suspension des subventions au centre de loisir des écoles bilingues de Rennes, pour la raison que les relations y sont en langue bretonne. Ce ne serait pas "universel". La responsable, Véronique Aulnette, explique : "La Caf estime qu'un centre de loisirs doit répondre à la demande de n'importe quelle famille. Nous répondons que ce centre est ouvert à tous, y compris les non-bretonnants. Pour les petits, de 3 à 6 ans, la langue n'est pas une barrière. Ils se font au breton de manière naturelle. Il n'y a que les adultes pour penser que c'est un obstacle !".

La Caf ne semble pas avoir compris que la méthode d'apprentissage par immersion est très efficace pour l'apprentissage d'une langue... Mais, en France, on confond encore "universalité" et langue française. Pourtant il y a eu (notamment en Bretagne), et il y a encore (notamment dans les Dom Tom) des millions de citoyens français qui n'ont jamais parlé la langue française, et probablement encore quelques centaines de milliers qui ne la parlent toujours pas actuellement... La citoyenneté est compatible avec le multilinguisme (voir la Suisse) et le contrat qui fonde une nation également. Mais ce contrat se discute, évolue au cours du temps et c'est bien là le problème. En France, il n'évolue pas vite, notamment dans le domaine des langues dites "régionales"; ou alors pas dans le bon sens.

Christian Le Meut  

10/06/2007

Bibliothèques et langues régionales : ce n'était pas la BNF

Concernant cette note, Maryvonne, de Nantes, apporte quelques précisions, car il ne s'agit pas du site de la Bibliothèque nationale de France comme je l'avais indiqué : "Hélas, ce n'est pas la Bibliothèque Nationale... on en est loin.  Mais avec toutes ces initiales, on peut confondre. Ce n'est qu'un détail, mais je crois utile de vous le signaler.C'est la revue bimestrielle "Bulletin des bibliothèques de France " (BBF) qui publie, par l'intermédiaire de l'ENSSIB, (école nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques), basée à Villeurbanne, près de Lyon. C'est une revue très riche, très bien documentée qui expose les progrès des bibliothèques du monde (surtout Europe et Pays anglo-saxons, dont USA). Elle n'est pas connue du grand public car très spécialisée et est dans le "fonds professionnel" des bibliothèques importantes.Chaque n° est à thème en général".  Merci à Maryvonne pour cette précision importante. Ce site, comme je le signalais, vient de publier un article sur les langues régionales et les bibliothèques et comment ces dernières peuvent aider l'édition en langues régionales (article signalé par le Conseil culturel de Bretagne). Voici un extrait de cet article écrit par Jacqueline Le Nail, bibliothécaire à Rennes :

"Le breton, brezhoneg, a dû connaître son nombre maximal de locuteurs en 1914. Les enquêtes réalisées dans les années 1930 parlent de 1 200 000 locuteurs. C’était alors la langue celtique la plus parlée devant l’irlandais et le gallois. La tradition écrite y est très ancienne (fin du VIIIe siècle) et le texte le plus ancien, le fragment de Leyde, fragment d’un traité de médecine en latin annoté de gloses en breton 14, précède de plus de cinquante ans le plus vieux texte écrit en vieux français et en vieil allemand, le Traité de Verdun (843). Le breton a donc été écrit bien avant l’imprimerie qui date en Bretagne de 1484 à Bréhan et 1485 à Rennes. Il existe un incunable breton, le Catholicon, imprimé à Tréguier en 1499 ; il s’agit d’un dictionnaire trilingue, breton-français-latin, destiné aux clercs et aux étudiants. Entre 1500 et 1789, on a recensé plus de 1 500 livres imprimés en breton, littérature religieuse, dictionnaires et grammaires, textes satiriques, poésie, théâtre… Certains ouvrages connaissent de multiples éditions successives, 71 pour le Colloque de Quiquer, petit manuel de conversation français-breton (au format poche), dont la première édition date de 1626 pour durer jusqu’en 1915 ! Un best-seller pendant près de trois cents ans. "

http://bbf.enssib.fr/sdx/BBF/frontoffice/2007/03/document...

31/03/2007

Perak e vehe ur yezh all geneoc'h ?

“Perak e vehe ur yezh all geneoc’h-c’hwi ?... War-dro dek vloaz zo em boa klasket da zisplegiñ d’ur vignonez din stad ar brezhoneg e Breizh. E Montargis (Loiret) e oan e chom d’ar c’houlz-se. Ar plac’h-se oa desket awalc’h, stummourez, hag ezel ag ar strollad sokialour (PS). Diaes oa geti kompren ar pezh a lâren met, moarvat, ne zisplegen ket mat an traoù dezhi. Setu perak he doa goulennet genin : “Met perak e vehe ur yezh all geneoc’h ?” (“mais pourquoi auriez-vous une autre langue ?”).

Ne m’eus ket mui soñj ag ar pezh m’boa reskontet dezhi ha ne 'm’eus ket mui darempredoù geti met ur mignon all, ur mignon kozh, Georges, a zo e chom e Sant-Sten (Saint-Etienne - Loire), en deus poan ivez e kompren perak emañ ken talvoudus ar brezhoneg evidon-me (ha pas hepken evidon-me). Georges a zeu bep bloaz da Vreizh da vakansiñ. Setu ar pezh eh on e vonet da zisplegiñ dezhañ...

“Perak e vehe ur yezh all geneoc’h ?” : ar pezh a oa, hag a zo souezhus barzh ar goulenn-se a zo an amzer implijet rak hon eus ur yezh all. Div yezh a vez komzet e Breizh izel abaoe kantvedoù ha kantvedoù, hag ar brezhoneg a veze komzet araok ar galleg. Memestra evit ar gallaoueg e Breizh Uhel. Ul liamm a zo etre ar Vretoned a Vreizh Izel hag ar brezhoneg, memes get ar re ha ne gomzont ket mui ar yezh-se. Perak ? Rak ar breton a veze komzet get muioc’h evit ur milion a dud hanter-kant vloaz zo c’hoazh. Rak ar breton a vez komzet amañ abaoe pemzek kant vloaz, ha marteze muioc’h : 1.500 vloaz, memestra...

Yezh-vamm ha yezh-vamm-gozh
Evel ur bochad tud a Vreizh em’eus div yezh : ma yezh-vamm, ar galleg, desket get ma zud. Hag ur yezh all : ar brezhoneg, desket genin rak ma zud n’hellent ket deskiñ ar yezh-se din. Ma zud kozh a gomze div yezh, razh.  Ar brezhoneg a zo, neuze, ma yezh a-orin, ma yezh vamm-gozh. Barzh ma zi 'm’eus kasedigoù get sonennoù enrollet daou-ugent vloaz zo get tad ma zad kozh, Pierre Thomas, ma zad-kuñv, ganet e fin an naontekvet kantvet e Plenuer (Ploemel, e-tall An Alré). Pierre Thomas a gane e breton, e yezh-vamm, hag un tammig e galleg. Met, e-mesk e vugale vihan, n’eus kazimant den ebet evit kompren ar pezh a gane Pierre Thomas. Hag e-mesk ma rummad din me, bugale e vugale vihan, kollet eo ar brezhoneg da-vat. Ha normal eo ?

Troc’het eo bet deomp hor yezh vamm-gozh. Ni a c’hell komz, ha lâret hor soñjoù memestra, met e galleg hepken... Hon tud kozh a gomze div yezh ha ni, nemet unan. Setu ar “modernité”, moarvat. N’hellomp ket mui kompren ar pezh bet enrollet get hon tud kozh, na lenn ar pezh a oa bet skrivet gete. Perak ? Perak n’o deus ket desket deomp o yezh-vamm ? Perak o deus difennet d’o bugale komz brezhoneg ?

Rak lakaet oa bet barzh o fennoù e oa gwelloc’h evit dazont o bugale dilezel o yezh-vamm ha deskiñ galleg. Setu perak tud ma zad a gomze breton etreze, met galleg d’o bugale... Dre fors bout lakaet ar brezhoneg er maez ag ar vuhez pemdeziek, ekonomikel, sokial, ha c'hoazh, ar brezhoneg a zo bet dilezet da-vat. N’eo ket ur yezh falloc’h evit ar re all. Tamm ebet. Ur yezh eo evel ar re all, met dindan gwask ur galloud a faote he distruj...

Troc'hiñ yezhoù, troc'hiñ teodoù
Ur mignon 'n eus kontet din penaos e vamm a faote dezhi komz brezhoneg getañ e fin he buhez; met digomprenapl oa evit he bugale-vihan...  Klask troc’hiñ ur yezh, lakaat an dispriz war an dud a gomz ar yezh-se, a zo torfedoù bras. Dre hon istor, dre hor familhoù, dre ar vro e-lec’h eh omp e chom, hon eus div yezh amañ. N’eus ket pell zo e oan e Batz-sur-Mer, e Liger Atlantel, e lec’h ma veze komzet c’hoazh breton araok ar brezel-bed diwezhañ. Echu eo. Ne chom ket nemet roudoù. Met ur bochad roudoù. Pa sellan doc’h stad ar brezhoneg e Krac’h, ma farrez a orin, heñvel a vo a-benn ugent vloaz marteze.  

Al lodenn vrasañ ag ar Vretoned o deus graet o soñj : dilezet o deus o yezh vamm-gozh. Tud a lâr e vehe re ziwezhat deskiñ brezhoneg rak ne vehe ket mui komzet brezhoneg e Breizh, ar pezh a zo faos. Un digarez eo : komzet e vez breton c’hoazh bemdez e Breizh get tud kozh ha tud yaouank, e kêrioù bras ha war ar maezioù. Tud er vro a gav gwelloc’h deskiñ saozneg, pe sinaeg... Perak pas ? Met dazont ar brezhoneg a zepant ag ar Vretoned. Pas dazont ar sinaeg pe ar saozneg...

Div yezh ‘m eus evel ur bochad Bretoned. Ur yezh-vamm hag ur yezh-vamm-gozh. Laouen on. Perak e vehe ret din dibab etre an eil hag eben ? Den ebet, stad ebet, iliz ebet, galloud ebet n'en deus droad da droc’hiñ ar yezhoù... nag an teodoù. E añv an doujañs e kenver an dud, hag e añv gwirioù mab den.

Esperañs m’eus e vin komprenet gwelloc’h get ma mignon Georges, a Sant-Sten, goude bout displeget an traoù-se dezhañ, e galleg, evel rezon. Ha ma n’on ket bet komprenet mat, e klaskiñ gerioù all.

Christian Le Meut

13/03/2007

Ar galleg en arvar ? Le français en danger ?

Tud a lâr e vehe ar galleg en arvar a gaos d'ar saozneg ! N'eo ket ar pezh a sonjan-me, nag ar pezh a zo skrivet barzh Libération hiriv, kit da welet/Certains affirment que le français serait menacé par la domination linguistique anglaise; je ne le crois pas, ni l'auteur de l'article en lien  :  

http://www.liberation.fr/vous/240455.FR.php

10/03/2007

Semaine de la francophonie : 10-17 mars...

La "Semaine de la langue française" commence demain d'après ce texte produit par le Ministère français des affaires étrangères. La langue bretonne y aura sa place, cherchez bien... Et répondez par un commentaire si vous pensez avoir trouvé. Sinon, la réponse bientôt sur votre écran. Betek ar c'hentañ !
 
"La langue française et la Francophonie seront à l'honneur dans les jours qui viennent, en France et à l'étranger, avec le lancement de la Semaine de la langue française, le 10 mars, et la Journée internationale de la francophonie, le 20 mars.Le thème de la 12e Semaine de la langue française est celui des Mots migrateurs".
 
Ce thème témoigne de l'importance que nous accordons aux diversités culturelles et linguistiques. Les dix mots de notre langue qui ont été choisis pour 2007 (abricot, amour, bachi-bouzouk, bijou, bizarre, chic, clown, mètre, passe-partout, valser) illustrent, chacun, les voyages des mots d'une langue à l'autre, d'une civilisation à une autre, qu'ils'agisse d'emprunts du français aux autres langues ou d'allers-retours de mots qui changent de sens en cours de route et, ainsi, enrichissent le français.

Le ministère des Affaires étrangères apporte un soutien actif à la Semaine de la langue française, ainsi qu'à la Journée internationale de la Francophonie. Le réseau diplomatique et consulaire, les centres culturels, les entreprises et les associations de Français à l'étranger organisent, en partenariat avec les pays de la Francophonie, de nombreuses manifestations à
cette occasion."

 
 
 
Et la réponse est "bijou" qui descend du mot breton "biz" (doigt) ! Mais bon, un "doigt" de breton, un nuage d'occitan ("amour"vient de l'occitan-provençal) ne font pas le printemps des langues dites régionales en France qui restent largement méconnues, voire mal-aimées par les autorités de ce pays...

11/02/2007

Auray/An Alre : An Dasson nevez !

medium_AnDasson63157.jpgAn Dasson n°63 'zo deuet er maez : ur veaj bras e Paris a zo kontet get Daniel Carré. Penaos ober anaoudegezh er BHV-Paris get ur vaouez a orin a Grac'h ? A vered Père Lachaise betek mirdi Carnavalet, ar veajour a foeta straedoù kerbenn Bro C'hall e sellet doc'h ar savadurioù, met ivez d'an dud. Beajoù all a zo barzh an niverenn-se : e Houat hag Edig, e Pleyben, ha dre ar yezh ivez get troioù lâret a bep sort. An Dasson n°63, Kerlenn Sten Kidna, 6 rue Joseph Rollo, 56400 Auray/An Alre. 4 € (6€ dre ar post). TéL. 02 97 29 16 58.

An Dasson n°63 : Le numéro 63 de la revue bilingue an Dasson, éditée par le Cercle Sten Kidna d'Auray, est paru. Daniel Carré y invite à une promenade dans Paris, du Père Lachaise au BHV et au musée Carnavalet. Ur regard sur les monuments de la capitale française, et ses habitants ou comment faire connaissance avec une Crac'hoise d'origine dans les travées du BHV ? D'autres voyages, plus proches, conduisent à Houat, Hoedic et Pleyben. Des dictons bretons sont également présentés. An Dasson n°63, Kerlenn Sten Kidna, 6 rue Joseph Rollo, 56400 Auray/An Alre. 4 € (6€ par la poste). Tél : 02 97 29 16 58.

19/01/2007

Le Fou du roi sur France Inter : "Et pourquoi pas le breton et le corse ?"

Encore un grand moment de débat linguistique ce vendredi midi sur France Inter, dans le Fou du roi, en présence de Mme Cresson, qui sort un bouquin. Le débat tourne autour des langues pas bien enseignées en France et qui, en Europe, coûteraient "un milliard" (d'euros, je suppose) pour les traductions. Et rendez-vous compte, mesdames messieurs, le "gaëlique" d'Irlande et le "slovène" viennent d'être intégrées, ça fait deux langues en plus.

Ah oui, et alors ? Le gaëlique est langue officielle de la République d'Irlande, avec l'anglais, et aurait dû depuis longtemps être reconnu par l'Europe (mais les Irlandais ne semblent pas avoir insisté dans ce sens lors de leur adhésion en Europe, en 1972). Quant à la Slovénie, adhérente depuis 2004, pourquoi sa langue ne serait-elle pas reconnue et accueillie dans les institutions européennes, au même titre que les autres langues que sont l'allemand, le français, l'anglais, le danois, l'italien, le portugais, l'espagnol ? C'est un simple principe d'égalité afin que tous les textes officiels de l'Union européenne soient accessibles à tous les citoyens européens, dans leurs langues nationales.

Mais cela ne semble pas avoir effleuré certains chroniqueurs et invités du Fou du roi. L'un d'eux, cependant, a rétorqué que cela ferait du boulot pour les traducteurs mais Stéphane Bern, le présentateur, a répondu que ces postes là ne sont pas occupés par des Français, trop nuls en langues... Mais l'Europe ne se réduit pas à la France ! Et quelle est la proportion de traducteurs français parmi les traducteurs employés par l'UE ? Nous ne l'avons pas su.

"Ils parlent français" 
Et puis les langues bulgare et roumaine sont intégrées elles aussi depuis le 1er janvier 2007 alors même que, selon Mme Cresson "Ils parlent français en Roumanie et en Bulgarie"... Ah bon, et dans quelle proportion, Mme Cresson ? On ne le saura pas. A croire que la planète entière parle français ! La Bulgarie et la Roumanie, en tant qu'Etats, font partie de l'organisation internationale de la francophonie, comme l'Egypte, cela ne signifie pas que tous les habitants de ces pays parlent français !

Un ami de retour de Roumanie signalait récemment, dans une soirée en langue bretonne où il parlait de son voyage, qu'il avait rencontré un Roumain parlant français, mais d'un certain âge. J'ai moi aussi rencontré, il y a quelques années, des Serbes et Kosovars parlant français (Ibrahim Rugova, leader des Albanais du Kosovo, parlait bien le français pour avoir vécu en France). Mais les jeunes générations parlent plutôt anglais, comme seconde langue... Leur langue quotidienne est, évidemment, leur langue maternelle.

Le "langage" des Chypriotes 
Mme Cresson a rajouté que les Chypriotes, entrés dans l'Union en 2004, ont également tenu à ce que leur "langage" (terme par elle employé) soit également reconnu, alors qu'ils "parlent tous" anglais là bas. Ah bon ? Et dans quelle proportion, Mme Cresson ? Nous ne l'avons pas su. Les Maltais n'en ont pas pris pour leur grade alors même que leur langue, parlée par 300.000 personnes (à peine plus que le breton !) est désormais langue officielle de l'Union européenne (depuis 2004).

Un invité (que je n'ai pas identifié) a cru bon de rajouter que, si le roumain et le bulgare, le slovène et le gaélique, sont reconnues, pourquoi pas "le breton et le corse" ? Et bien oui, pourquoi pas ? Le catalan, le basque et le galicien sont désormais des langues dans lesquelles on peut s'adresser à l'Union européenne, à charge pour l'Etat espagnol de traduire dans une langue officielle de l'UE. L'Union européenne est bien plus ouverte à la diversité linguistique que les chroniqueurs du Fou du roi, très en phase avec la politique officielle française dans ce domaine : il y a une seule langue officielle en France, rappelons-le. Les langues régionales sont tolérées à petites doses...

Place des langues, place des femmes, même combat ? 
Et Mme Cresson de stigmatiser la faible place des femmes dans la représentation politique en France : 13 % de députés, nous sommes avant dernier devant la Grèce... La Grèce, justement, avec la France, n'a pas, si ma mémoire est bonne, ratifié la charte européenne des langues minoritaires. Ce sont les deux seuls Etats dans ce cas au sein de l'UE, ils sont donc régulièrement rappelés à l'ordre sur ce thème (le traitement des minorités nationales), mais les médias ne relaient pas beaucoup ces critiques là...

La mauvaise connaissance des langues étrangères par les Français est revenue sur le tapis. On se plaint d'un côté de mal pratiquer les langues étrangères et, de l'autre, de la diversité linguistique qui serait un problème ! Ce ne serait pas un peu contradictoire ?  L'argument financier ne tient pas la route, il n'est qu'un prétexte. La diversité culturelle, linguistique, comme la diversité biologique, naturelle, a un coût. Il est vrai que l'uniformité peut "coûter" moins cher financièrement, mais son coût en terme de souffrances humaines, de  pertes culturelles et linguistiques est, lui, incalculable.

Nostalgie de la domination ? 
Mme Cresson a rappelé que François Mitterrand ne parlait que le français. Mais il le parlait bien (ça, c'est moi qui souligne). Si les Français sont si "nuls" en langues,  encore qu'il faudrait examiner ce cliché à la loupe, c'est peut-être aussi à cause de ce culte de la langue française érigée en ferment d'unité nationale en France; culte associé à un mépris des langues régionales parlées dans l'Hexagone, et un mépris des langues étrangères (la française étant la plus belle, celle des Lumières, etc, etc.). Il y a aussi cette nostalgie de la domination qui fait que l'on regrette que l'autre soit différent, qu'il ne soit pas comme nous, qu'il parle une autre langue alors que la normalité, c'est de parler français, bien évidemment. Ne devrait-on pas plutôt se réjouir de sa différence ?

Ce qui transparaissait dans les propos tenus ce midi sur France Inter, c'est surtout une inquiétude face à la perte d'influence du français et le peu d'intérêt pour la diversité culturelle et linguistique dans sa réalité. Or la langue française sera sauvée parce qu'elle fait partie de la diversité et de la richesse culturelle et linguistique de notre planète. Dans ce sens, le combat pour les langues bretonne, corse, basque, occitane, alsacienne (etc), est le même que le combat pour la langue française. Mais peu de Français, juchés sur leur piédestal francophone (et souvent parisianiste), ont l'air de s'en rendre compte.

Christian Le Meut
 

 

 

 

28/12/2006

Mauvaise langue...

medium_teod146.jpgUne fois par an à peu près, je retrouve un vieil ami, d’origine bretonne et habitant dans le sud-Finistère, que je connais depuis le lycée... Il ne parle pas breton mais, à chaque fois que nous nous retrouvons, il me branche sur le sujet en tentant de faire de l’humour. Et alors, l’indépendance ? Et alors les terroristes ?... C’est un peu lourd et désobligeant, mais je ne l’ai pas encore envoyé paître car nous sommes, en général, avec d’autres amis. Le fait d’apprendre et de parler breton ne fait de moi ni un terroriste, ni un indépendantiste, ni même un autonomiste (les deux notions sont, à tort, souvent assimilées tant l’histoire française ne connaît que le centralisme pas toujours démocratique).

Débattant avec cet ami, un jour, j’ai appris que son propre père parlait breton. Mon ami, né comme moi au début des années 60, est donc le premier de sa lignée à ne pas parler sa langue d’origine... Car si le breton n’est plus parlé que par 250.000 personnes environ en Bretagne, c’est la langue d’origine de bien plus de monde mais beaucoup se hâtent de l’oublier. C’est vrai quoi, pas moyen de vivre tranquille dans son petit coin de Bretagne mais en français, et uniquement en français. La plupart des noms de lieux et de noms de familles viennent du breton, mais c’est bien dans le décor, l’on francisera tout cela petit à petit. C’est déjà commencé. Et puis voilà ces emmerdeurs qui décident de continuer à parler breton. On peut encore pardonner aux anciens dont c’est la langue maternelle mais les plus jeunes, ceux-là dérangent peut-être un peu plus. Ils empêchent de vivre en toute bonne conscience unilingue française. Alors autant les caricaturer...

Unilingue ou bilingue ? 
C’est étonnant quand même que des personnes parlant une seule langue, mais  dominante et officielle, se croient autoriser à mépriser des personnes et des populations bilingues ou multilingues dans leurs vies quotidiennes ! J’ai entendu récemment sur France Inter un écrivain britannique, Juif et originaire de Turquie. Lui-même s’exprimait en français et évoquait son père qui savait écrire onze langues dans sept alphabets différents. Il y a des gens qui peuvent écrire onze langues dans spet alphabets différents et nous, pauvres crétins bretons (ou corses, basques, etc), n’aurions pas pu apprendre le français autrement qu’en abandonnant notre langue ?

De la diversité culturelle faisons table rase au profit de la plus belle langue du monde, la langue française évidemment. Tous les arguments ont été bons, et tous servent encore. Face à celles et ceux qui résistent au rouleau compresseur culturel, on déploie tout un arsenal de clichés : arriérés, ploucs, sectaires, communautaristes, terroristes, fascistes, etc. Mais cela ne cache la politique menée par l’Etat français depuis la fin du XIXe siècle, qui est une politique culturel ethnocidaire. On ne tue pas les gens mais leurs cultures, sous des prétextes divers. Le meilleur étant encore de prétendre nous faire accéder aux “lumières” de la philosophie française tout en nous coupant de notre langue d’origine et en commettant ainsi un crime culturel délibéré du meilleur obscurantisme...   

Alors il n’est pas surprenant de rencontrer parfois des amis ou connaissances qui nous ressassent les mêmes vieilles rengaines. Certains ont, pour eux-mêmes, renoncé à la langue bretonne : quoi de plus facile à faire dans notre monde francophone où la langue bretonne a si longtemps été marginalisée ? Les bretonnants dérangent parce qu’ils montrent une autre voie, un autre choix de vie, un peu moins conformiste peut-être.

Un vrai choix ?
En pratiquant ou en apprenant la langue bretonne ils accèdent à une connaissance, à une histoire, à une richesse supplémentaire, à un trésor linguistique et culturel formé à travers les siècles par des générations de locuteurs. Ce trésor là, sa valeur est incalculable par les financiers et ne rentre pas dans le calcul des indices boursiers. Les locuteurs de la langue officiel unique, la langue française, restent à côté. Libre à eux. Mais ont-ils réellement choisi, ou n’ont-ils fait que suivre la route que les pouvoirs dominants ont tracé pour eux, notamment à travers l'Education nationale ?

Qui veut tuer son chien dit qu’il a la rage; qui accepte qu’on lui coupe sa langue d’origine, voire sa langue maternelle, prétend qu’elle ne vaut rien et que la nouvelle langue qu’on lui apporte sur l’autel de la modernité et des lumières le satisfera en tout. Balivernes, l’être humain n’est pas un robot dont on change les pièces indifféremment et sans souffrance. Souffrance et perte il y a eu, et il y a encore.

Je ne reverrai pas mon vieil ami avant quelque temps mais j’ai dans l’idée que, la prochaine fois qu’il me branchera, y’aura encore du débat.

Bec’h a vo tudoù !

Christian Le Meut 

Le dessin est tiré de l'album de Gaston en breton qui vient d'être édité (lire ci-dessous).