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14/05/2008

Langues régionales : propos de sénateurs

Deux débats ont eu lieu sur les langues régionales, l'un à l'Assemblée Nationale, la semaine dernière, l'autre au Sénat, hier. Ils ont été plutôt de bonne tenue, à ce que j'ai lu, sauf exception comme Jean-Luc Mélenchon. Le site Oui au breton (lien dans la colonne de gauche),  publie l'intégralité des interventions des sénatrices et sénateurs. Le débat à l'Assemblée peut être consulté sur internet (lien direct dans la note du 8 mai). J'ai relévé quelques citations intéressantes de ce qui a été dit au Sénat : je conseille particulièrement celles de Jean-Paul Alduy, sénateur UMP des Pyrénées-Orientales, et j'ai ajouté parfois des commentaires en italiques.

Gérard Le Cam, PC, Côtes d'Armor : "La langue bretonne est en danger, selon l’Unesco : trois locuteurs sur quatre ont plus de 50 ans, les locuteurs actifs représentent moins de 5 % de la population des départements bretons. Le processus historique de construction de la Nation française a confondu unité et uniformité ..."

"De 2000 à 2006, l’État a consacré 3,2 millions au breton, soit douze fois moins que les départements ! M. Alfonsi (sénateur de Corse à l'origine du débat - Note de Rezore) a raison d’évoquer des obligations à la charge de l’État, dont l’engagement reste très relatif. Je cite Csaba Tabadji, député européen hongrois, président de l’intergroupe Minorités traditionnelles, régions constitutionnelles, langues régionales : « En France, les cultures et langues dites régionales, qui font partie intégrante des cultures et des langues européennes et de l’humanité, exclues de l’espace public par la législation, marginalisées, sont en voie de disparition rapide de la vie sociale malgré la résistance de l’auto-organisation souvent exemplaire des populations, avec le soutien de leurs élus, dans un cadre juridique, administratif et idéologique hostile. Après des décennies d’éradication, l’enseignement de ces langues reste très marginal et leur place dans les médias, notamment la radio et la télévision, est extrêmement réduite. »

- Citation intéressante que celle de ce député européen Csaba Tabadji; Gérard Le Cam a été interrompu dans son intervention par le sénateur PS Jean-Luc Mélenchon qui a qualifié les écoles associatives non-confessionnelles gratuites Diwan de "secte".  Diffamons, diffamons, il en restera toujours quelque chose...

Colette Mélot (UMP Seine-et Marne) : "La langue française est garante de l'unité de nôtre pays".

- Ah bon ? Entre 1940 et 1945 les collaborateurs et les Résistants parlaient tous français, ce qui ne les empêchaient pas de s'entretuer. En ex-Yougoslavie, Serbes, Croates et Bosniaques parlaient la même langue, cela n'a en rien empêché l'éclatement. Et la guerre d'Irlande entre anglophones ? Et la guerre de sécession aux Etats-Unis ? Et les multiples guerres civiles dans l'histoire du monde ?... La Suisse officiellement multilingue est-elle plus ou moins "unie" que la France ? Le respect des droits démocratiques, civils et religieux, le respect des minorités, la justice sociale, l'accès à l'éducation, la prospérité économique, sont des garanties de paix et d'unité bien plus efficaces que l'uniformité linguistique, me semble-t-il.

Jean-Luc Mélenchon (PS) : "Je n’accepte pas la caricature qui voudrait faire croire que la République française réprime ou méprise les langues régionales. La France s’est dotée dès les années cinquante d’un cadre législatif très favorable, en avance sur beaucoup de pays d’Europe. La loi du 11 janvier 1951 du socialiste Maurice Deixonne a autorisé et favorisé l’apprentissage dans l’enseignement public du basque, du breton, du catalan et de l’occitan. Le corse a été ajouté en 1974, le tahitien en 1981 et quatre langues mélanésiennes en 1992. Depuis 1970, ces enseignements en langues régionales peuvent être pris en compte pour l’obtention du baccalauréat."

- La loi Deixonne de 1951, un "cadre législatif très favorable" ? De qui se moque notre cher sénateur ? J'en ai profité personnellement de cette loi : deux heures de cours par semaine en option, à partir du lycée seulement, entre 13h et 14h (pendant que les autres élèves se reposaient), par des professeurs volontaires (donc pas de relève en cas de départ d'un prof...). C'était une avancée par rapport à la situation précédente d'exclusion totale, mais une toute petite avancée. Insuffisant, en tout cas, pour garantir la pérennité d'une langue.

"Une définition aussi floue de ce qu’est une langue régionale ou minoritaire est discriminatoire et aboutit à des reconstructions de l’histoire. La langue bretonne est celle qui résulte du dictionnaire dit unifié de 1942, qui se substitue aux cinq langues bretonnes existantes. Je n’évoquerai pas son auteur, collaborateur qui fut condamné à mort par contumace, ni les conditions dans lesquelles ce dictionnaire fut rédigé et financé à l’époque..."

- Un grand linguiste, ce M. Mélenchon et un grand historien aussi, probablement, qui ignore, peut-être, que les lois françaises ont été, sous la Révolution, traduites dans plusieurs langues régionales, notamment le breton. C'était plus sûr pour être bien compris du peuple ! Donc, entre 1789 et 1793, la République traduisait ses lois en langues régionales et il y avait déja une écriture pour le breton; Les "cinq langues" dont il parle ici, sont les cinq dialectes bretons qui n'empêchent pas l'inter-compréhension. Enfin, le fait que des grammairiens et intellectuels bretons aient travaillé à l'unification de la langue écrite sous l'occupation nazie, et avec la bénédiction de l'occupant, est une erreur et une faute, j'en conviens aisément. Mais l'Académie française a-t-elle arrêté de travailler sous l'occupation ? Elle a continué, comme toutes les administrations françaises. Faut-il tirer de la collaboration vychiste des arguments contre la langue française ? Evidemment non, ce serait ridicule. Les vociférations antisémites de Louis-Ferdinand Céline ne discréditent pas la langue française (d'ailleurs il continue d'être étudié au lycée), alors pourquoi s'obstiner contre la langue bretonne ? Enfin "l'auteur" qu'évoque M. Mélenchon, s'appelait Roparz Hémon et n'a jamais été condamné à mort mais à dix ans d'indignité nationale en 1945.  M. Mélenchon, est-il soucieux des faits historiques ?

Raymond Couderc, sénateur UMP (Hérault) : "L’absence de statut juridique justifie de nombreux blocages. Ainsi, récemment, un recteur pourtant bien disposé à l’égard des langues régionales justifiait l’interdit de l’immersion en disant que si elle était accordée, il faudrait aussi la permettre pour le chinois, l’arabe et le turc. Mais le destin de ces langues ne se joue pas en France, contrairement à celui de l’occitan et des autres langues régionales !"

Alima Boumediene-Thiery (Les Verts - Paris) : "Certains disent redouter un communautarisme. Pourquoi la reconnaissance, encadrée, des langues régionales créerait-elle du communautarisme ? Ces langues sont transmises depuis des générations, cela n’empêche pas de parler français ! Ce dont il s’agit, c’est d’organiser la coexistence de la langue française avec les langues minoritaires, pas de substituer l’une à l’autre. Les langues régionales sont source d’enracinement et de cohésion sociale, l’unité de la République n’est pas menacée par elles : au contraire, elle est préservée dans sa diversité. L’identité française est également faite de ses différences, de ces enrichissements linguistiques. Le nier reviendrait à nier une bonne partie de notre patrimoine. Reconnaître cette diversité culturelle plutôt que la nier est le plus sûr moyen de préserver l’identité républicaine. Si nous voulons être tous égaux, commençons par admettre que nous sommes aussi tous différents."

Jean-Paul Alduy (UMP - Pyrénées Orientales) : "Je ne m’adresserai pas à vous en catalan. Non que je sois incapable de m’exprimer dans cette langue parlée par 10 millions d’Européens, la huitième langue d’Europe. Certes, l’école de la République m’avait interdit l’accès à cette langue et, dans ma jeunesse, on écrivait sur les murs des préaux : « Soyez propres : parlez français!» mais, depuis lors, j’ai appris cette langue et conduit une politique active de reconquête de la culture et de l’identité de Perpignan la Catalane. Si je ne m’adresse pas à vous en catalan, c’est que je veux être compris par tous, que je veux respecter notre unité, forte de nos diversités. Je suis pour la catalanité qui enrichit et non pour le catalanisme qui dresse des frontières et réduit notre espace économique, social et culturel" (...).

"Le débat que nous avons aujourd’hui doit être abordé en termes sereins. Il ne doit être ni folklorisé ni caricaturé. Le fait de n’avoir pas, dès l’origine de notre République, dès la proclamation des Droits de l’Homme, considéré la protection de la langue et de la culture d’origine comme un droit fondamental, est, même si cela s’explique par la préoccupation de donner naissance à un État moderne et homogène, une erreur historique que n’ont pas faite d’autres pays européens. A l’heure où l’on défend la biodiversité comme une valeur cardinale, garante du respect des différences, cette exception apparait comme une crispation idéologique sans véritable fondement logique." (...) .

"Parler catalan, basque, alsacien, occitan, breton ce n’est pas ringard, c’est posséder une identité multiple, une interculturalité qui sera, demain, le socle de nos sociétés. Les langues régionales, ce n’est pas la France d’hier, ce sont les racines de la France de demain."

- J-L. Mélenchon  n'accepte pas que l'on accuse la France d'avoir réprimé les langues régionales. Pourtant, son collègue  des Pyrénées Orientales  donne un exemple très concret  à travers ce slogan qu'il a vu sur les murs des préaux : "« Soyez propres : parlez français!»

Jacques Gillot (apparenté PS - Guadeloupe) : "Le refus de l’ouverture engendre les communautarismes, les frustrations et, parfois, les blessures. Aucune langue n’est petite pour ceux qui l’habitent ! Je formule donc le voeu que la Charte européennes des langues minoritaires soit ratifiée sous peine de rétrécir linguistiquement une France méritant mieux que des refus obstinés et des aveuglements culturels. Les langues aussi ont besoin de liberté, d’égalité et de fraternité !"

Christine Albanel (ministre de la culture) : "Une loi donnera une forme institutionnelle au patrimoine linguistique de la nation en récapitulant les dispositions existantes et en ouvrant la voie à une avancée de la démocratie culturelle dans notre pays. Elle concernera l’enseignement, les médias, les services publics, ainsi que la signalisation et la toponymie. Originaire de l’Ariège et de Toulouse, j’aime, comme plusieurs orateurs, profiter des doubles noms indiquant les rues et les lieux. Ce texte, qui sécurisera l’usage des langues régionales, conformément au souhait du Président de la République, devrait voir le jour en 2009, et le Gouvernement compte sur la représentation nationale pour contribuer à l’améliorer".

- Un texte qui "sécurisera" l'usage des langues régionales, qu'en termes inquiétants et policés ces choses là sont dites. Pour l'instant la seule chose concrète qui sort de ces débats au parlement est le refus persistant du gouvernement de ratifier la charte européenne des langues régionales. La Constitution sera-t-elle modifiée ? Pas sûr... Quelles seront les avancées de cette future loi qui sortira en 2009, soit l'année précédant les élections régionales ? On n'en sait rien pour l'instant... 

Christian Le Meut 

13/05/2008

Breton à l'école : des parents d'élèves inquiets

Setu ur gemenadenn all a-berzh Div Yezh/Voici un autre communiqué de l'association Div Yezh (parents d'élèves de l'enseignement public bilingue) : "De la carte scolaire et d’un projet de loi"

Div Yezh association de parents pour l’enseignement du breton à l’école publique tient à faire part de son mécontentement sur les résultats des cartes scolaires de l’enseignement bilingue public et son inquiétude à la suite du débat du 7 mai à l’Assemblée nationale.

Première constatation : La faiblesse des moyens se fait sentir pour tous. Une ponction des moyens s’est effectuée en maternelle. Les effectifs peuvent être lourds en classes bilingues qui sont souvent des classes à cours multiples. On ne constate aucune accélération de la création de classes bilingues publiques depuis une dizaine d’années. Les efforts du Finistère contrastent avec les résultats mitigés du Morbihan et des Côtes d’Armor et le blocage en Ille et Vilaine et Loire-Atlantique.

Deuxième constatation : 4 projets d’ouvertures de nouveaux sites bilingues qui présentaient un nombre suffisant d’enfants, 15 ou plus, sont refusés : Guichen, St Etienne de Montluc, Bannalec et Pleyben. Seuls Pleyber-Christ et Ploeren (56) ouvriront.
De plus, le ministère de l’Education Nationale avait depuis 2002 mis 24 postes au concours de professeurs des écoles publiques bilingues. 15 postes seulement ont été ouverts pour le concours de mai 2008.

Ces refus d’ouverture de nouveaux sites bilingues posent de multiples questions, en particulier celle du respect de la demande populaire. La France se défend auprès des instances internationales comme l’ONU en prétendant que la non reconnaissance des langues comme le breton ne l’empêche pas d’accéder aux demandes des parents qui souhaitent un enseignement du breton pour leurs enfants. Force est de constater que ce n’est pas le cas.

Dans ce contexte, le gouvernement nous promet une loi sans modification constitutionnelle, sans charte européenne des langues. Une loi au rabais comme le fut en son temps la loi Deixonne ? Pourtant dans un premier temps, la proposition de loi prévoyait la généralisation progressive de l’enseignement bilingue dans toutes les régions de France. Nous étions en 1951. Plus de 50 ans plus tard, la France traine toujours les pieds. Une loi sur les langues régionales sans modification de la constitution sera censurée et vidée de son intérêt par le Conseil constitutionnel. Pourtant, comment ne pas lier les mauvais résultats en langues des élèves français avec le fait qu’ils sont monolingues et que dans leur milieu familial et environnemental il n’existe désormais plus qu’une seul langue : le français ?

Un autre exemple de la mauvaise volonté du gouvernement : le volet enseignement bilingue du contrat de projets n’est toujours pas signé. Nous soutenons donc la proposition du Président Le Drian de voir confier, dans le cadre de l’expérimentation, l’enseignement de la langue bretonne à la Région Bretagne. Nos langues sont autant de richesses culturelles, elles font partie de notre patrimoine et il faut mettre en œuvre une politique ambitieuse pour les conserver et les transmettre aux générations futures". (13/05/2008)

08/05/2008

Langues régionales : toujours pas de ratification de la Charte européenne

An diviz a zo bet dec'h er Vodadeg vroadel a zo bet interesant ha doujus awalc'h (ar pezh a chanche keñver tabutoù paseet war ar yezhoù rannvroel), met e fin an abadenn, an intron Albanel, ministrez ar Sevenadur, deus displeget c'hoazh penaoz ne vo ket kadarnaet, ratifiet, Karta Europa ar yezhoù minorel get gouarnamant Bro Frans, ar pezh a zo dipitus. Prometaet he deus ul lezenn nevez... Met petra a vo e-barzh ?

Ma faota deoc'h lenn ar pezh a zo bet lâret dec'h, embannet eo war lec'hienn ofisiel ar Vodadeg vroadel (eil lodenn ag an destenn) : 

Le débat qui a eu lieu hier à l'Assemblée Nationale a été intéressant et relativement respectueux (ce qui change par rapport à des débats précédents sur les langues régionales mais, en fin de séance, la ministre de la culture, Mme Albanel, a expliqué que le gouvernement ne ratifierait toujours pas la Charte européenne des langues minoritaires, ce qui est décevant. Elle a promis une nouvelle loi... Mais quel en sera le contenu.

Si vous voulez lire le contenu du débat, il est édité sur le site officiel de l'Assemblée nationale (deuxième partie du texte) :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2007-2008/200801...

07/05/2008

Et nous avons couru !

Et nous avons couru ! Nuits et jours. De Nantes à Carhaix, soit 600 km sous le soleil, la lune, la pluie, le vent, dans le brouillard, dans la chaleur ou dans le froid. Avec entrain, énergie, et douleur parfois. Sur le plat, dans les montées, les descentes; sur des routes étroires ou de larges avenues, et pour finir, dans un champs, nous avons couru.

Des centaines de personnes se sont passées le relais, des milliers ont couru derrière elles. D'autres milliers les attendaient sur le bord des routes pour les encourager. Enfants, adolescents, adultes, et parfois grand-parents. Elèves ou parents des écoles Diwan (immersion), des écoles bilingues publiques ou bilingues privées, membres d'associations ou de clubs sportifs, d'entreprises, de communes, de toutes professions; bretonnants ou non, apprenants, sympathisants. Avec parfois des élus.

Aucun accident à déplorer sur les 600 km, grâce aux bénévoles qui couraient eux aussi, pour bloquer la circulation, assurer l'animation, conduire les véhicules accompagnateurs, donner de l'eau aux coureurs, assurer la sécurité. 

Plus de 600 km vendus...
La première Redadeg, course pour la langue bretonne, du 1er au 3 mai, a donc été un succès. Tous les km ont été vendus, à 100 euros le km, au profit des écoles Diwan, cette année. La prochaine Redadeg devrait se faire pour le compte d'une autre association oeuvrant pour la langue bretonne. Des associations, particuliers, entreprises, communes, ont acheté ces kilomètres. Au final, plus de 600 km.  C'est donc environ 60.000 euros qui ont été, ou sont en cours d'être collectés pour Diwan. Association qui court, elle aussi, et tout le temps, pour boucler ses budgets.

L'écho de la course n'a, semble-t-il, pas trop atteint les médias parisiens. A part quelques flashs sur RTL, France Info, France Inter (mais peut-être en avez-vous entendu d'autres ?). Des reportages sur France 3 "Ouest". Ils sont un peu bloqués, du côté de Paris, par rapport aux langues "régionales"... Les radios bretonnantes étaient présentes, notamment Radio Bro Gwened avec Andrea Le Gall sur une moto, venant interviewer les porteurs de relais.

Ensemble
C'était émouvant de voir tellement de gens impliqués, courant pour montrer leur volonté, leur détermination, leur bonne humeur, leur "begon" (prononcer "beudjon", en breton vannetais, leur pêche, leur énergie); se passant le relais de main en main, de kilomètre en kilomètre, de commune en commune, de département en département. Bien-sûr, beaucoup d'entre nous, militants, bénévoles, parents d'élèves, enseignants, courons déjà toute l'année pour la langue bretonne mais là, nous l'avons fait ensemble, et pas chacun de son côté. 

Merci aux organisateurs, et félicitations à eux (à nous !).

Y-aura-t-il une autre Redadeg, une autre course pour la langue bretonne dans deux ans ? Ce serait "fiskal", "dreist", super. 

Et quoiqu'il arrive, ne perdons pas ce souffle, ce rythme, ni cet état d'esprit.

Christian Le Meut

http://arredadeg.free.fr/ 

06/05/2008

Langues régionales : une loi en 2009 ?...

Vingt députés UMP, dont plusieurs bretons, qui signent une tribune en faveur des langues régionales dans un journal basque; une loi qui serait en préparation pour 2009...C'est à lire sur le site Oui au breton.

Citation extraite de la tribune des députés : "Il est temps de sortir des clichés faciles et méprisants que certains répètent à l’envi dès que ceux qui sont attachés à leur identité culturelle s’expriment. Que l’on cesse à chaque fois que nous souhaitons faire reconnaître nos patrimoines linguistiques locaux de nous agiter le mistigri de la fin de l’unité française ! Aimer parler alsacien, basque, breton, corse, flamand, gallo, occitan ou provençal et vouloir transmettre ces langues, ce n’est pas trahir la France mais c’est l’aimer et l’enrichir ! Non, les langues régionales n’ont rien à voir avec le patois, elles sont le fruit d’une histoire et d’une culture qui, souvent, fondent l’histoire de notre pays. Comment construire l’avenir de notre pays en reniant ses fondements ? L’unité n’est pas l’unicité. Connaissez-vous une famille dont les membres sont absolument identiques ? Et même si cette famille existait, trouveriez-vous cela très sain ? Nous ne sommes pas des clones. L’égalité n’est pas l’uniformité, nous estimons au contraire que les différences contribuent à l’affirmation d’une richesse culturelle commune".

http://ouiaubreton.com/ 

05/05/2008

Ha redet hon eus !

Ha redet hon eus ! A Naoned da gKaraez. Noz ha deiz. Edan an amzer brav, edan an amzer fall, edan an heol, al loar, ar glav, an avel, al latar, ar yenijenn... Get tud all, ur bochad d'ar peurliesan, pe un nebeut a wezhoù. Get plijadur ha poan. Get startijenn ha skuizder ivez. Miliadoù a dud a oa war bord an hent evit reiñ kalon deomp; miliadoù o deus redet ivez : 2.000 ? 3.000 ? Bugale (a Ziwan, hag ar skolioù publik ha privez ivez), oadurion, gwazed, merc'hed; tud a bep sort micher; ha dilennidi ivez. N'eus ket bet gall zarvout ebet a-hed ar 600 km a drugarez d'an aozourion hag a oa e redek e pep lec'h, e komz barzh ar mikro, e reiñ dour d'ar rederion, ec'h ober ar dro ar surentez.

Berzh 'deus graet ar Redadeg. Dastumet eo bet geti argant : 60.000 €, ha marteze muioc'h. Euroioù a zo bet roet get tud, kevredigezhioù, embreregezhioù met ivez kumunioù. Pennadoù skrid a zo bet embannet barzh ar c'hazetennoù rannvroel, un nebeut abadennoù er skinwell (F3) hag er skingomz (France Info, France inter, RTL... ha Radio Bro Gwened a oa daet get ur moto !). Met dasson ar redadeg n'eo ket aet betek Paris. Bouzard awalc'h int, du-hont, e-keñver ar yezhoù rannvroel.

Fromus eo bet, gwelout kement-se a dud e redek evit ar brezhoneg, e tiskouezh ho youl, ho begon (distaget "beudjon" : "startijenn" e gwenedeg); e reiñ ar vazh test a zorn da zorn, a gilometr da gilometr. Anat eo, redet e vez geneomp a-hed ar bloaz evit ar brezhoneg, n'eo ket bet gortozet geneomp ar Redadeg evit redek da vat. Met ar wezh mañ, redet hon eus asambles, ha pas pep hini d'e du, pep hini barzh e vro, ar pezh a zo bet kalonekus bras. Trugarez d'an aozourion. Ha gourc'hemennoù dezhe.

Hag e vo ur redadeg all evit ar brezhoneg a-benn daou vloaz ? Fiskal vehe.

Ho leskel a ran bremañ, mont a ran da redek.

Christian Le Meut

Ar Redadeg : testenn Nolwenn Korbel

Sed amañ testenn ar gemennadenn he deus beajet er vazh-test etre Naoned ha Karaez.
Gant Nolwenn Corbel eo bet skrivet ha lennet eo bet war leurenn Kerampuilh gant Yann-Herle Gourves.

Voici le texte  écrit par  Nolwenn Korbel et qui était dans le témoin que 600 relayeurs se sont passés tout au long de la Redadeg. Il a été lu par l'acteur Yann-Herle Gourves sur la scène, à Carhaix, à l'arrivée des coureurs.

 "Tamm ha tamm 'vez graet e vragoù da Yann
Tamm ha tamm 'teu kof d'ar vamm
skolpenn ha skolpenn 'vez stummet an delwenn
Dorn ha dorn 'vez frailhet ar skorn
Delienn ha delienn 'teu blev d'ar wezenn
Kest ha kest 'teu reut ar voest
Bleuñv ha bleuñv 'vez fichet ar c'hleuz
Lagad ha lagad 'tiskoacher ar c'had
Taolenn ha taolenn 'tifluk an awen
Gwalenn ha gwalenn 'tistrujer ar chadenn
Ger ha ger 'vez kavet ar ster
Houlenn ha houlenn 'teu kein d'ar wagenn

Tamm ha tamm, ya, tamm ha tamm
Met tamm ha tamm n'eo ket bras a-walc'h al lamm

'Baoe m'eo savet an heol e redan
War hentoù distradet, plaen, strizh ha ledan
O teurel pled deus kement den a welan
O terc'hel soñj deus kement kan a glevan
'Baoe m'eo tarzhet an deiz e redan
War-lerc'h petra, piv ? N'em c'houlenn a ran !

Hir, hir, hir, hir, hir an hent
Hir, hir, hir, hir, hir an neudenn Her,
her, her, her, her an hent
Pe'r, pe'r, pe'r, pe'r 'vo e penn ?

'Baoe ar c'hokerikero kentañ e redan
Bountet, douget, heñchet ga'n avel, ar glizh, ar balan
Ailhenn, glav pil polos, ar grizilh a faoutan
Tan an heol, dev ar boan a zouran
'Baoe m'eo ganet ar bed e redan
War-lerc'h petra, piv ? N'em c'houlenn a ran !

Hir, hir, hir, hir, hir an hent
Hir, hir, hir, hir, hir an neudenn
Her, her, her, her, her an hent
Pe'r, pe'r, pe'r, pe'r 'vo e penn ?

'Baoe m'eo difoupet ar vuhez e redan
Met aze, hiou, bremañ, diouzhtu e skuizhan
O stouiñ ma fenn 'rak kement urzh a lonkan
O plegiñ ma choug di'an kement taol a dapan
'Baoe m'eo lusket ma c'halon e c'houlan
An aotre da sevel, da brechiñ, da vezañ
Met hiou eo an nevez-hañv, ga'r goukoug e kanan
Da gavout ma hent ha redek pa garan !
"

Nolwenn Korbell (miz Ebrel 2008)

04/05/2008

Langues régionales : un débat parlementaire attendu

Div gevredigezh ag ar Morbihan o deus skrivet d'ar gannaded araok an diviz a vo er Bodad vroadel dimerc'her kentañ, d'ar 7 a viz Mae. Deux associations morbihannaises ont écrit aux députés avant le débat sur les langues régionales qui aura lieu mercredi prochain, 7 mai. Setu o kemenadennoù/Voici leurs communiqués.

Lizher bet kaset d'ar c'hwec'h kannad ag ar Morbihan get Kerlenn Sten Kidna An Alré/Lettre envoyée par le cercle Sten Kidna aux six députés du Morbihan.

"Le 02/05/2008

    Madame/Monsieur le député   
    Pour la première fois un débat parlementaire est prévu à l'Assemblée nationale le 7 mai prochain afin d'évoquer la situation des langues régionales en France. Nous saluons cette initiative qui doit, à nos yeux, déboucher sur une véritable reconnaissance de ces langues, dont beaucoup sont menacées de disparaître dans le siècle actuel, situation que dénonce l'Unesco.

    Nous souhaitons que le gouvernement et le Parlement prennent, à la suite de ce débat, des mesures concrètes afin de lever des freins qui empêchent encore aujourd'hui la pleine reconnaissance de nos langues régionales. Il s'agit, notamment, de leur donner un statut officiel en ratifiant la charte européenne des langues minoritaires, signée par le Premier  Ministre Lionel Jospin en 1998 et jamais ratifiée. Et si cette ratification exige une modification de la Constitution, il faut la modifier.

    Nous demandons aussi qu'il ne soit pas mis de frein, notamment en terme de postes d'enseignants, à l'enseignement des langues régionales tant en maternelle et primaire  (classes en immersion, bilingues...), que dans le secondaire (immersion, filières bilingues, options) et à l'université. Il faut que les élèves bilingues puissent bénéficier d'un suivi durant l'ensemble de leur scolarité.

    Nous demandons que la place des langues régionales dans les médias publics régionaux (France 3, France Bleue) soit augmentée afin d'aboutir à une parité horaire des programmes dans les régions où des langues régionales sont parlées. Et pourquoi ne pas envisager des médias publics régionaux exclusivement en langues régionales ?

    Nous comptons sur vous, Monsieur le député, pour que les langues régionales de France, langues maternelles de beaucoup d'entre nous, soit enfin pleinement reconnues par la République Française; sans contester la place de la langue française comme langue commune.

    Nous espérons que vous prendrez pleinement part à ce débat. A wir galon geneoc'h/De tout coeur avec vous

    Kerlenn Sten Kidna - An Alré/L'association Kerlenn Sten Kidna - Auray"

Kemenadenn a-berzh Emglev Bro An Oriant/Communiqué de Emglev Bro An Oriant :
"Emglev Bro an Oriant, Fédération de 46 Associations du Pays de Lorient,  compte sur la présence des députés Françoise OLIVIER-COUPEAU (Présidente du Groupe d'Études sur les Langues Régionales à l'Assemblée Nationale), et Jacques LE NAY au débat prévu le 7 mai 2008 à l'Assemblée Nationale sur les langues régionales, pour faire enfin avancer le débat en France en vue de la ratification de la Charte Européenne des Langues Minoritaires". Emglev Bro an Oriant : Tel : 02.97.21.37.05."
emglev@bzh.net

01/05/2008

Redomp evit ar brezhoneg/Courons pour la langue bretonne

Hiriv, ha betek disadorn, kantadoù a zen, ha merteze miliadoù, a red hag a redo evit ar brezhoneg, ha me ivez. Ar Redadeg a zo loc'het a Naoned hag a dremen ar Morbihan hiriv, Penn ar bed warc'hoarzh. Mont a ran da redek ur c'hilometrad etre An Alré ha Lokoal-Mendon. Ma faota deoc'h gouiet muioc'h :

Aujourd'hui et jusqu'à samedi des centaines, des centaines de personnes, voire des milliers, courent et vont courir pour la langue bretonne. La Redadeg est partie de Nantes et traverse le Morbihan aujourd'hui, le Finistère demaine. Je vais courir un kilomètre entre Auray et Locoal-Mendon.  Pour en savoir plus :

http://arredadeg.free.fr/ 

La vidéo du départ est sur le net :

http://www.dailymotion.com/Setubzh/video/8848174 

29/04/2008

An Alré/Auray : Sten Kidna soutient Ar Redadeg

Kemenadenn a-berzh Kerlenn Sten Kidna - Communiqué du cercle Sten Kidna (pays d'Auray) :

"La course pour la langue bretonne, Ar Redadeg, passe en pays d'Auray jeudi après-midi, 1er mai. Cette initiative née hors de toute association, a pour but de promouvoir la langue bretonne à travers une course à pied avec passage de relais tous les km, de Nantes à Carhaix, en passant par Lorient, Quimper, Brest, Morlaix... Soit 600 km !

Pour sa première édition, les organisateurs de la Redadeg ont choisi de soutenir les écoles Diwan dont c'est le 30e anniversaire. Une prochaine édition, dans deux ans, soutiendra une autre association travaillant pour le breton. Kerlenn Sten Kidna a acheté, comme d'autres associations, ainsi que des communes, des entreprises, des commerces, ou de simples particuliers du pays d'Auray, un kilomètre, qui sera parcouru jeudi à partir de l'école de Kerstran, en Brec'h, pour prendre la direction de Locoal-Mendon.

Notre association appelle la population à venir encourager les coureurs sur le parcours ou sur les lieux de regroupement comme à Auray. Une animation organisée par l'école Diwan d'Auray  aura lieu à partir de 16h derrière la mairie, avec des bagadoù, des sonneurs, des stands de spécialités bretonnes...

Voici l'ordre de passage prévu des coureurs dans les communes du Pays d'Auray traversées : Santez-Anna an Alré 15h57; Plunered 17h27; An Alré (Auray-mairie) 17 h 46; Mendon 19 h 02; Landaol; Landevant : 19 h 42.
Le parcours précis et plus de renseignements sur Ar Redadeg : http://arredadeg.free.fr
Contact pour le pays d'Auray : David ar Gall : 06.83.27.83.14."

24/04/2008

Débat au parlement : une pétition de Bretons du monde

En vue du débat parlementaire prévu le 7 mai*, l'association Bretons du monde lance une pétition afin d'encourager les députés dans la reconnaissance des langues dites régionales à travers un soutien à Marc le Fur, vice-président de l'assemblée qui a fait pression sur le gouvernement pour obtenir ce débat; ce mode opératoire me paraît, cependant, un peu restrictif. Il ne s'agit pas de soutenir une personne particulièrement, mais des mesures précises à faire voter par les députés. Voici l'argumentaire de Bretons du mode :

"A l'heure où la France voudrait se positionner internationalement en faveur des droits des Tibétains et se montrer à la hauteur de ce qu'elle revendique d'être (le pays des Droits de l'Homme), une chance historique lui est donnée le 7 mai 2008 de redorer son blason en faveur de ses minorités et plus particulièrement en faveur de ses langues minoritaires toujours pas reconnues par sa constitution.

Pour que la France ne réserve pas son indignation à l'éviction de la langue tibétaine de la gare de Lhassa alors que le breton est toujours banni dans toutes les gares bretonnes,

Pour que la France ne se fasse plus épingler par l'ONU, pour "discrimination raciale" comme l'indique le récent rapport de l'experte indépendante Gay Mc Dougall,

Pour que le Conseil de l'Europe ne redemande plus à la France de signer la Convention Cadre pour la Protection des Minorités et de ratifier la Charte des Langues Minoritaires,

Pour que la France n'exige plus des pays candidats à l'adhésion à l'Union européenne qu'ils respectent la charte européenne des langues minoritaires alors que elle-même ne le fait pas,

Pour que le rectorat de Rennes ne supprime pas en septembre 2009 l'enseignement du breton et du gallo dans 14 collèges et lycées comme l'envisage le ministère de l'éducation nationale,

Pour qu'en 2060, il subsiste, selon les prévisions actuelles, non pas un effectif résiduel de 20 000 personnes parlant breton et regardant, impuissantes, s'éteindre définitivement leur langue, mais au contraire un nouvel effectif supérieur et rajeuni, d'au moins 100 000 personnes, seuil minimum de survie défini par l'UNESCO,

Ou tout simplement pour que l'extinction de la langue bretonne programmée de longue date par l'état français soit conjurée,

Nous appelons tous les élus français, et d'une façon plus large tous les citoyens du monde informés du débat historique du 7 mai prochain à l'Assemblée Nationale sur les langues régionales, à apporter leur soutien au Député Marc Le Fur, initiateur du débat".

* Débat préalable à la réforme institutionnelle qui pourrait enfin modifier l'article 2 de la constitution française.

Site internet : 

http://www.gwalarn.org/obe/

23/04/2008

Ici, "on n'a jamais parlé breton" : faut voir !

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Je lis chaque semaine Marianne chez mes parents; c'est un hebdo intéressant même si on n'y trouve rarement d'informations sur les langues régionales en France, par exemple. Ils et elles seraient un peu jacobins à Marianne, que ça ne m'étonnerait pas, mais il y a sans doute des exceptions. D'ailleurs, cette semaine, c'est tout une page qui est consacrée au gallo, cette langue d'oil parlée dans l'Est de la Bretagne. Et l'on y découvre avec étonnement qu'Alain Rémond, chroniqueur dans ce journal (page "Faut voir"), est gallèsant de langue maternelle. C'est le succès du film Bienvenue chez les Ch'tis qui le lui a rappelé. Il en parle d'ailleurs avec précaution et respect : "Je suis né bilingue, gallo-français". "Bilingue", cependant, cela signifie que l'on parle deux langues alors qu'il qualifie le gallo de "patois". Est-ce qu'il ne resterait pas dans l'approche d'Alain Rémond quelques préjugés, par rapport au gallo, mais aussi par rapport à la langue bretonne ? 

"On appelait ça le patois"
"Contrairement à ce que certains pourraient croire, écrit-il, (...), tout le monde ne parle pas breton en Bretagne. Il existe toute une région, dans l'est de l'Ouest, où on n'a jamais parlé breton. Mais gallo. Quoiqu'il puisse m'en coûter, mettons les points sur les i, si le breton est bel et bien une langue, le gallo, lui n'est qu'un dialecte. Comme le ch'ti. Et, comme le ch'ti, le gallo est un dérivé du vieux français. Donc du latin. Je n'ai su que très tard que je parlais gallo. Chez moi, dans mon village, on appelait ça le patois".

"Contrairement à ce que certains pourraient croire, écrit-il, (...), tout le monde ne parle pas breton en Bretagne" : je ne sais pas ce que peuvent "croire" les lecteurs de Marianne avec le peu d'informations que ce journal publie sur les langues régionales. Il y a actuellement eniron 250.000 locuteurs du breton contre plus d'un million il y a 60 ans. L'Unesco classe cette langue parmi les langues en danger de disparition. Je n'ai pas le souvenir d'avoir lu ça un jour dans Marianne. 

Dialecte ou langue ?
L'auteur considère le breton comme une vraie langue : c'est déjà ça, et je suis bien d'accord avec lui sur ce point. Par contre son gallo maternel ne serait "qu'un dialecte" (on notera la formulation restrictive), venant du "vieux français".  La linguiste Henriette Walter, qui a étudié de près le gallo à l'Université de Rennes, le définit comme "la forme que le latin a prise en Haute-Bretagne" (1). Je l'ai rencontrée il y a quelques années et je me souviens de cette phrase qu'elle m'a dite : "Parlez vos patois !" Elle utilisait ce mot sans caractère péjoratif et rappelait ainsi que les "patois" et autres "dialectes" recèlent des richesses linguistiques et scientifiques inestimables. Alors le gallo, langue ou dialecte ? La frontière est assez floue entre les deux. Personnellement, je considère le gallo comme une langue, la langue gallèse, qui mérite d'être transmise, étudiée, enseignée et soutenue.

88e1d793e17f0bdee6eb2346a4f9683e.jpgMais il y a une autre point dans la chronique d'Alain Rémond, qui me semble contestable d'un point de vue historique : "Il existe toute une région, dans l'est de l'Ouest, où on n'a jamais parlé breton. Mais gallo." Je ne connais pas Alain Rémond mais, à la lecture de ses chroniques, je ne serais pas étonné qu'il soit originaire de l'est du Morbihan, le Morbihan gallo. Or, la carte ci-contre le montre, "on a parlé breton" sur tout le territoire qui constitue actuellement le Morbihan; idem pour les Côtes d'Armor, la moitié ouest de l'Ile et Vilaine et le quart nord-ouest de la Loire-Atlantique (on parlait breton sur la presqu'île de Guérande au début du XXe siècle).

L'extension maximale de la langue bretonne, au IXe siècle, arrivait aux portes de Rennes, dépassait Dôle au nord et allait jusqu'à Pornic, dans l'actuelle Loire-Atlantique, au sud de la Loire. Une partie de la toponymie y est toujours d'origine bretonne. Histoire ancienne, me direz-vous ? Certes, mais la pratique de la langue bretonne y a duré quand même plusieurs siècles, puis a reculé. On y a donc parlé breton.

On a parlé (et on parle) breton à Nantes et Rennes
Il n'est pas rare d'entendre ce genre d'affirmation : "Ici on n'a jamais parlé breton"; "A Rennes on n'a jamais parlé breton"; ou encore "A Nantes on n'a jamais parlé breton"... En est-on si sûr ? Les Bretons de "Basse-Bretagne" (ou Bretagne bretonnante), se déplaçaient. Ils allaient travailler, vendre des marchandises, demander justice, rendre visite à de la famille, dans ces deux grandes villes qu'étaient Nantes et Rennes. Et l'on y a parlé breton pendant des siècles dans certains quartiers, j'en fais le pari... Comme à Paris et ailleurs. Certes, c'était (et c'est encore), la langue d'une minorité. Comme le français aussi, à l'époque, alors que le gallo était celle de la majorité des gens du peuple.

Je suis surpris d'ailleurs, de voir à quel point une langue parlée par une si petite quantité d'êtres humains a voyagé et voyage encore, et s'installe parfois jusque dans des lieux lointains comme New-York, l'Argentine, l'Islande, la Chine, etc. Les références à ce sujet ne manquent pas sur Rezore.

"Ici on n'a jamais parlé français" 
Et puis je n'ai jamais entendu l'équivalent de cette expression pour le français : "Ici, on n'a jamais parlé français". Pourtant il n'y a pas si longtemps encore, beaucoup de Bretons étaient monolingues (j'ai connu une grand-mère qui parlait uniquement sa langue maternelle et ne maîtrisait pas le français). Il y a beaucoup de communes de Bretagne, surtout en campagne, où l'on ne parlait pas français il y a 100, 150 ans, où très peu de gens maîtrisaient cette langue (le curé ? les nobles ?...); les témoignages historiques sont clairs là-dessus.

90f2a6fb981cfad5f06ceb35013f31cc.jpg La carte ci-contre le montre également (2). Elle date de 1863 : le Finistère, en noir, fait partie des départements où "aucune, ou presque aucune des communes ne parle français"; pour le Morbihan et les Côtes d'Armor "une proportion relativement importante de communes ne parlent pas le français". L'Ile et Vilaine est classée comme département "incertain"... Il y a 145 ans donc, l'étude du ministre de l'instruction publique de Napoléon III, Victor Duruy, montrait que 7,5 millions de Français (sur 30 millions) étaient des "patoisants monolingues", soit 25 % de la population.

Parmi eux, les Bretons bretonnants. Mes ancêtres sans doute, puisque mes quatre grand-parents étaient bilingues breton-français. Probablement aussi, les ancêtres d'Alain Rémond qui parlaient gallo dans des communes de l'Est de la Bretagne où, pendant des siècles, "on n'a jamais parlé le français". Ou si peu. 

Christian Le Meut

(1) Henriette Walter, "L'aventure des langues en Occident", Ed. Robert Laffont. 1994.

(2) R. Anthony Lodge, "Le français, histoire d'un dialecte devenu langue", Ed. Fayard, 1997.