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25/07/2006

Festival interceltique ou interceltoc ?

A l'approche du nouveau Festival interceltique (du 28 juillet  au 6 août) je réactualise cette petite note, toujours d'actualité, hélas.

"Jean-Pierre Pichard, directeur du Festival interceltique de Lorient a déclaré dans Le Télégramme du 12 août 2005, je cite : “Les défenseurs de la langue bretonne ont bien trop souvent tendance à attendre qu’on les aide et à gémir sans cesse. Je suis tout à fait d’accord pour que la langue bretonne ait sa place au festival mais il ne faut pas tout attendre de nous. A eux de nous faire des propositions et  de rendre la langue bretonne attrayante au festival”...
Le propos est donc clair : Jean-Pierre Pichard ne s'inclut pas de lui-même  parmi les défenseurs de la langue bretonne ! Etonnant de la part du directeur d'un festival qui s’affiche “interceltique” et qui a lieu dans une région où se parle encore une langue celtique ! Si la langue bretonne n’est pas défendue par de telles personnalités, et par de tels événements, par qui le sera-t-elle ? Au moins, le propos à l'avantage d'être franc (et en français exclusivement). Dommage car une langue disparaît environ tous les quinze jours sur notre belle planète, conséquence du colonialisme et de la mondialisation. Pour l'instant, cela se passe surtout du côté des langues aborigènes d’Australie (justement, l'Australie est invitée en 2006, on pourrait en profiter pour en débattre...) et amérindiennes d’Amérique du Sud et du Nord, et du côté des langues africaines, mais le breton est parmi les suivants sur la liste.

Un lieu où l'on réfléchit ?
Un linguiste, Bernard Caron, du CNRS, déclarait au Monde le 26 août dernier qu’une langue est menacée de disparition quand elle est parlée par moins d’un million de personnes... Le breton en est à 250.000 locuteurs contre 1,2 million il y a cent ans.  Sa disparition est possible, sauf si une vraie politique publique de soutien est mise en place comme au Pays de Galles. Le festival interceltique pourrait être une locomotive dans ce domaine. Au contraire, c'est un wagon de queue. La venue des Acadiens aurait pu, en 2004, être l'occasion de susciter un débat. La Constitution du Canada reconnaît deux langues, l'anglais et le français. Les peuples amérindiens peuvent éduquer leurs enfants dans leurs langues d'origine (avec une des deux langues officielles, semble-t-il).  Le bilinguisme et le multilinguisme, pourquoi et comment ça marche ? Pourquoi la France est-elle tellement en retard dans ce domaine? Pourquoi refuse t-elle d'appliquer la charte européenne des langues régionales (pourtant obligatoire) ? Pourquoi signer la convention de l'Unesco sur la diversité culturelle, et ne pas l'appliquer à l'intérieur des frontières ? Voilà des questions qui n'ont pas été posées l'année dernière... Elles pourraient l'être encore,  car le Festival interceltique pourrait aussi être un lieu où l'on réfléchit et où l'on voit plus loin que son kilt et que sa pinte de bière, non  ?

Des créations musicales, chorégraphiques, littéraires, théâtrales (etc) apparaissent tous les ans en Bretagne, en langue bretonne, en gallo ou en français. Quelle est leur place au Festival Interceltique ? Un café littéraire en français s’y déroule, pourquoi pas des séances en breton (50 livres en breton sont édités par an sans parler des revues) ? Les brittophones n'attendent pas sur ce festival pour agir, heureusement ! Ils ne passent pas non plus leur temps "à gémir" comme l'affirme si gentiment Jean-Pierre Pichard : n'ont-ils pas créé des écoles, des médias, des fêtes et moultes associations pour défendre la langue bretonne et lui construire un avenir là où l’Etat s’est acharné à lui creuser une tombe pendant un siècle ?

Beaucoup de musiciens et de danseurs bretons font partie de ces associations, ils ont compris que la mort de la langue bretonne serait une perte considérable pour la culture bretonne, de même que la disparition de la langue française risquerait d’être fatale à la culture française.  Mais cela M. Jean-Pierre Pichard l'a-t-il compris ?  Mystère... Pour l’instant, il attend des propositions..."
Christian Le Meut

Commentaires

Il est vrai qu'il est un peu étonnant qu'un type comme Pichard considère une catégorie de personnes, "les défenseurs de la langue bretonne" sans s'y mettre dedans (ce n'est pas une preuve d'une très grande ouverture d'esprit de sa part - la défense des langues minorisées devrait concerner tout le monde).

L'Office de la langue bretonne s'occupe de promouvoir la langue bretonne dans la vie publique, notamment en faisant signer la charte "Ya d'ar brezhoneg", qui comporte je crois 5 niveaux. La ville de Brest vient de signer cette charte récemment, ce qui l'engage à certaines actions.
Peut-être (sûrement même) que l'Office devrait se pencher sur le cas des festivals comme celui de L'Orient (qui aurait dû se sentir concerner sans même qu'on lui fasse la remarque).

Écrit par : Alwenn | 27/07/2006

Petite précision : le Festival interceltique a signé la charte "Ya d'ar brezhoneg" en 2004 (il me semble, il était environ la 475e organisation à la signer), mais celà n'a pas changé grand-chose par la suite...

Écrit par : christian | 28/07/2006

Rien d'étonnant dans les propos de Pichard. Il est temps qu'un collectif organisé vienne le voir avec un dossier sous le bras et des propositions concrètes mettant en avant les langues de spays celtiques (contes, théâtre, cinéma, chant, débats avec des interprètes et casques adéquats, rappeur gallois qui est au Ministère du Pays de Galles, à la culture...).
Arrêtons la victimisation et agissons de façon concrète (remise en question dans la presse, lettre ouverte, rendez-vous avec Pichard, programmation culturelle proposée, subventions de la région pour les appuyer, etc...). Qui cela intéresse-t-il ?

Écrit par : fanny | 15/08/2006

Fanny : oui, les propos de Pichard sont étonnants; non, je ne vois pas en quoi mon article ferait dans la "victimisation". L'avenir de la langue bretonne dépend des Bretons (des gens qui habitent en Bretagne, des gens qui se sentent concernés), mais le Fil et son directeur, eux, n'ont pas l'air de se sentir tellement concernés (c'est une litote). Faire des propositions ? Pourquoi pas, mais sans trop d'illusions.

Écrit par : christian | 16/08/2006

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