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18/02/2006

Chronique d'un néo

Voici le texte d'une chronique diffusée mercredi 15 février 2006 sur Radio Bro Gwened (Pontivy).

“Voici maintenant presque quatre ans que je tiens cette rubrique sur Radio Bro Gwened, et je dois vous avouer quelque chose. Pas un grand crime ni un grand défaut mais un petit fardeau que je porte dans ma vie quotidienne, quand même. Voilà, je suis un “néo”. Oui, un “néo”, qu’est-ce que c’est que cette bête là, vous demandez vous ? On connaît un peu les “bobos”, bourgeois bohème que l’on trouve beaucoup dans les grandes villes, mais le néo, kézako ? Il s’agit du néo-bretonnant. Cette espèce bizarre de gens qui n’ont pas appris le breton comme une langue maternelle, mais qui l’ont apprise soit à l’école, à l’université, en cours du soir, bref, comme ils ont pu, puisque la transmission familiale s’est quasiment interrompue. Les “néos” sont en général plus jeunes que la majorité des bretonnants de langue maternelle.

C’est en bretonnant que l’on devient bretonnant
De mon côté, mes quatre grands parents étaient bilingues mais je n’ai dû entendre parler breton qu’un dizaine de fois dans mon enfance. Le breton était mal vu et quasiment interdit, et sa transmission aux enfants absolument inconcevable. Pourtant, je n’étais pas d’accord avec cet état fait. Passer de deux langues à une seule ne me semblait pas un progrès de l’humanité. Alors j’ai commencé à prendre des cours à l’âge de 17 ans, mais la route a été longue et ce n’est qu’un vingtaine d’années plus tard que j’ai pu commencer à parler vraiment, grâce à une formation à temps plein pendant six mois. Je parle breton donc, plus ou moins bien, et je suis donc rentré dans le petit monde des néo-bretonnants.

Mais elle n’est pas toujours facile, la vie des “néos”... Nous ne parlons pas “le même breton” que les anciens, nous faisons des fautes... Le français est ma langue maternelle et je fais encore des fautes de français, je l’avoue. J’en fais plus en breton, c’est sûr, mais je pars de l’idée que c’est en bretonnant que l’on devient bretonnant ! C’est pourquoi je me suis lancé il y a quatre ans dans cette chronique que je tiens sur Radio Bro Gwened en breton chaque vendredi à 8 h 15. Combien de gens de 20, 30, 40, 50 ans ont appris le breton comme langue maternelle ? Très Très peu. Dans ces générations là, nous sommes nombreux à être des “néos”, à vouloir apprendre et travailler pour et en breton.

Il y a quelques mois un hebdomadaire en breton s’est créé, Ya! Presque mille personnes y sont désormais abonnées, et c’est une bonne nouvelle dans un paysage médiatique bretonnant qui a bien besoin de bonnes nouvelles. Mais voilà, une association de cours par correspondance a écrit à Ya! pour lui indiquer qu’elle ne peut pas en recommander la lecture à ses membres, à cause des fautes... L’équipe de Ya! est très réduite mais parvient à sortir un hebdomadaire en langue bretonne, ce qui relève de l’exploit, et voilà que certains jouent les rabats joie... Il reste des fautes dans les journaux du monde entier et dans toutes les langues, c’est la loi du genre; l’objectif est, évidemment, d’en laisser passer le moins possible, mais il en restera toujours car éditer un journal quotidien ou hebdomadaire implique de travailler vite.

On s’améliorera
Le breton n’est quasiment plus une langue maternelle. Quelques couples jeunes, et courageux, parlent breton à leurs enfants à la maison, mais ils sont rares. Nous, les “néos bretonnants”, ainsi que les enfants qui apprennent le breton dans les écoles bilingues, sommes donc l’avenir de la langue. Nous ne prononçons pas bien ? On s’améliorera. Nous faisons des fautes d’orthographe ? On s’améliorera. Avec l’aide des anciens... Ou sans elle.

Car le parcours du combattant néo bretonnant est parfois semé d’embûches. Il y a les anciens qui pourraient parler breton mais ne veulent pas. Il y a ceux qui parlent, mais pas avec les néo-bretonnants, difficiles à comprendre selon eux; il y a ceux qui veulent bien parler breton le matin, mais pas l’après-midi, ou l’inverse... Enfin, heureusement, il y a ceux qui ont plaisir à parler et à échanger, “même si ce n’est pas le même breton”, comme ils ou elle disent. Pour constater que, malgré les différences, on peut arriver à se comprendre progressivement.

Pismigourion zo
Alors oui, le “néo” fait des fautes. Mais il fait. Il travaille alors même que la langue bretonne a été abandonnée par la très grande majorité des Bas-Bretons. Pas par nous, les néos. Nous pourrions aussi rester muets, ne plus écrire, ainsi nous ne ferions plus de fautes. Peut-être serait-ce mieux pour certains qui, semble-t-il, préfèrent garder leur belle langue bretonne pour eux, mais ce serait grave pour le dynamisme de la langue bretonne.

“Néo”, en grec ancien, cela veut dire “nouveau”. Il y a donc des nouveaux, et du nouveau, dans le petit monde de la langue bretonne. Il y a aussi beaucoup de grognons, de “pismigourion”, mais ça, ça n’a pas l’air d’être très nouveau. Kenavo, en espérant ne pas avoir laissé trop de fautes dans cette chronique.
Christian Le Meut

Commentaires

tu sembles omettre un détail important : il est des néo bretonnants qui deviennetn tellement imprégnés de breton qu'ils ressentent le besoin de critiquer des "primo locuteurs" comme on dit en jargon universitaire : les anciens utilisent des tournures galleg saout, ils ne disent pas "ar skinwel" mais "an télé" etc...
comment devenir plus royaliste que le roi, ou plus breton que les bretons...

Écrit par : if | 19/02/2006

Comment peut-il y avoir un fossé entre les néo et les bretonnants de naissance ?!! Quand on aime le breton, la première chose à faire est de rendre visite aux anciens et d'apprendre avec eux. Ceux que j'ai rencontré n'ont pas honte de le parler et sont prêts à le partager...

Le breton authentique est à portée de main et pourtant, peu de néo semblent en profiter :(

Écrit par : dom | 19/02/2006

a du gant dom (mikeal), dav d'an holl mont da gaozeal gant ar re gizh, re laouenn int ha fier ruz da glevout tud yaouank oc'h ober yezh ar blouked!!!

pourquoi distinguer en permanence les néos des autres, il y a les bretonnants point barre...

bien sur, c'est vrai ce que nous dit dom; les anciens sont trop fiers de pouvoir parler avec des jeunes qui leur font comprendre que parler breton c'est pas un machin de ploucs, il faut le voir pour le croire, difficile de s'extirper quand on commence avec certains... ils ne nous lachent plus

je crois que l'on a mis en épingle les réactions de rejet de certains anciens qui se sentaient dévalorisés quant débarquaient à une époque des chevelus hirsutes en boutoù koad qui les prenaient de haut avec un breton haut de gamme et leur renvoyaient une image d'arriérés...

de là a découlé bon nombre de malentendus et de préjugés, les gwenn ha du ou breizh atao, pas de ça ici, gaster!!!

chenchet penn d'ar vazh eurusamant!!!
plijadur zo da gaout g'ar re gozh...

Écrit par : filig | 19/02/2006

Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous écrivez, Dom, If et Filig mais, dans cette rubrique (qui sera suivie d'autre), j'explique un peu ma vie en tant que "néo". Oui, j'ai rencontré des anciens qui ont du plaisir à parler breton, oui j'en ai rencontré d'autres qui m'ont envoyé paître. La honte ou la gêne de parler breton n'a pas complètement disparu... Surtout, j'ai l'impression que certaines personnes, anciennes ou pas, néo ou pas, n'ont pas forcément conscience de l'état de la langue bretonne et se focalisent sur des choses secondaires, comme les fautes. Aider à la réussite de médias nouveaux comme Ya! est autrement plus important que d'y compter les fautes, qui diminueront s'ils peuvent embaucher du personnel et ça, ce sera en fonction du nombre d'abonnés ! Un tel média, comme la radio, comme les revues, est important pour la lecture en langue bretonne mais aussi comme support de discussion pour les bretonnants quand ils se rencontrent.
Christain

Écrit par : christian | 20/02/2006

Oui, avec ou sans fautes, toutes les initiatives doivent être encouragées et la maîtrise parfaite de certains ne doit pas venir "plomber" la bonne volonté des autres.

Écrit par : Dom | 20/02/2006

je vais reprendre un écho de mon premier msg pour rebondir sur cette dernière réponse de dom
ben voilà, je trouve que l'on a tendance à simplifier les choses à outrance pour expliquer le malaise des apprenants...
et l'on ne considère comme apprenants que ceux qui prennent des cours, et bien moi je pense que ceux qui ont cessé de parler breton depuis des lustres et qui l'avaient appris "war barlenn o mammoù" ou "ez vihan" devraient être vus comme des (ré)apprenants aussi, et en cela avoir plus d'egard de la part de certains érudits qui ont le breton en poche et leun o fenn des gens jeunes et instruits qui l'ont appris jusqu'à le maitriser au plus haut point... car il en existe qui vont reprendre des anciens, par exemple remplacer certains mots de français par des néologies parfois inélégantes, il y a bien deux mondes dans le breton aujourd'hui : les anciens et les modernes, ne tombons pas dans le jeunisme mar plij

Écrit par : if | 21/02/2006

Bonjour If : moi aussi, je vais prendre des leçons auprès des bretonnants de langue maternelle heureux de parler leur langue (ce qui n'est pas le cas de tous, la relation de certains bretonnants à leur langue maternelle n'est pas toujours simple à comprendre). Et puis nous, les néos", sommes en majorité des militants de la langue bretonne, ce qui n'est pas le cas de beaucoup d'anciens qui l'ont eu dans le berceau mais que l'on a a stigmatisé pour qu'ils ne la parlents pas ni ne la transmettent.
J'exprime aussi, dans cette rubrique, une légère mauvaise humeur à l'égard de certains puristes parfois plus soucieux de la grammaire et de l'orthographe que d'encourager les initiatives...
Christian

Écrit par : christian | 22/02/2006

donc je distinguerais 5 catégorties de bretonnants en 2006:
- ar v/mohicaned (digarezit) ou anciens dont c'est la 1e langue car leurs parents ne parlaient que le breton, mes parents sont de ceux là car mes gds parents ont appris le français grâce à leurs enfants, ils n'y en aura plus d'ici 30 ans
- ar pennhered (héritiers, nés entre 1950 et 1980): eux aussi déclinent j'en ai bien peur, ils sont issus de familles bretonnantes et ont du faire l'effort de réapprendre une langue qu'ils ont eu dans l'oreille, pour eux ça n'a pas été facile car il a fallu surmonter le poids de la honte qui leur a été transmis
- ar re o deus desket war al levrioù penndabenn, bretonnants des livres et des cours et stages : la seule catégorie qui grossisse constamment, mais qui est partie de zéro
- ar studerien : ils sont tournés vers l'ecrit, j'y englobe tous les apprenants scolarisés en filière bretonne ou en stage de 6 mois, l'on craint un tassement de leurs effectifs, d'aucuns disent pfaute de moyens, d'autres disent par découragement.
Ils parlent peu le breton et trouvent peu d'occasions de le faire...
- ar gelennerien : hélas ils risquent fort de former les gros des bataillons de bretonnants au 21e siècle, et ce sont peut être les seuls qui parleront breton demain...

Écrit par : katell | 22/02/2006

pouriez vous indiquez les adesse des dite ou trouvez a lire ou écouté en bretons ( journal breton, radio difusant sur le net , jeunnees bretonantes voulant discuter( j ai 17ans) ...). En effet en cherchant sur google, je ne trouve pas grand chose.

Écrit par : le berre | 08/03/2006

Le 14 février vous trouverez une note sur les radios en langue bretonne et comment les écouter sur le net.

Écrit par : Christian | 08/03/2006

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