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18/07/2005

Choukrane, Ahmed

Ahmed Benamra est décédé le mardi 19 avril dernier à l’hôpital de Montargis, des suites d’une longue maladie, la sclérose en plaques.

Né en 1967, Ahmed Benamra a passé sa jeunesse dans l’agglomération montargoise, jouant, enfant, au club de foot de Chalette. Il a obtenu son Bac au lycée en Forêt, puis un Deug d’histoire à Orléans. Les signes de la maladie apparurent dès l’adolescence : chutes, difficulté à courir, fatigues... Jeune adulte, Ahmed Benamra devait déjà se déplacer en fauteuil roulant. Cela ne l’empêcha pas de devenir un grand voyageur : deux séjours au Québec, un voyage en Australie, plusieurs au pays de ses parents, l’Algérie, et un séjour au Pérou. Ahmed put monter, seul, jusqu’en haut de la ville mythique de Machu Picchu (2.000 m d’altitude).

Passionné de photographies, il rapporta des images de ce pays qui firent l’objet d’une exposition à Chalette. Il travailla plusieurs mois dans l’agence photographique parisienne Ciric, mais ne put faire son métier de cette passion à cause de la maladie. Ses photos, prise à hauteur d’un homme en fauteuil roulant, gardaient un regard d’enfant qu’Ahmed a toujours conservé. Une faculté à rire, à s’étonner, à s’amuser et à rencontrer l’autre. Un regard bienveillant et curieux.

Lorsqu’il était encore suffisamment fort, il partait seul avec son fauteuil et sa tente de camping, parcourant ainsi des centaines de kilomètres de routes de campagnes. Les habitants l’accueillaient, impressionnés par ce voyageur en fauteuil ne se déplaçant qu’à la force des bras. Il pouvait ainsi faire Montargis-Gien et retour, 40 km dans la journée, pour le simple plaisir de voir la Loire...
Lorsque ses forces déclinèrent, c’est en fauteuil électrique qu’Ahmed arpentait les rues de Montargis, s’indignant face aux voitures mal garées qui le contraignaient à des manœuvres dangereuses sur la rue.

Puis vint le temps où même manœuvrer un fauteuil électrique ne fut plus possible.

Jusqu’à l’année dernière, cependant, Ahmed Benamra put continuer à se rendre à Msila, ville d’origine de Tahar et Zineb, ses parents, en Algérie. Le climat et l’hospitalité des habitants lui faisaient du bien, disait-il. C’est à Msila qu’Ahmed rencontra Zakia, qui allait devenir son épouse en 1998. Une petite fille est née de cette union en 2000, Chaïma.

Cet homme au grand cœur voulait aussi alléger la souffrance des autres. Il fit convoyer des fauteuils roulants en Algérie lors de ses voyages. Six, l’année dernière. Pour des handicapés nécessiteux de là-bas. A la veille de sa mort, il a exprimé le souhait de faire don de tout le matériel médical dont il bénéficiait. Souhait respecté par sa famille. Ahmed luttait pour la vie, espérant toujours en la recherche médicale. Mais celle-ci n’est pas allée assez vite. Il a été enterré au cimetière de Chalette-Vésine.

Ahmed ne se plaignait pas, quand tant d’autres passent leur temps à geindre.
Ahmed luttait pour la vie, quand tant d’autres passent leur temps à faire la guerre, à se faire la guerre.
Ahmed est parti, mais sa famille et ses nombreux amis n’oublieront pas la leçon de courage, de générosité et d’humanité que fut sa vie.

Merci, Ahmed. Choukrane.

Christian Le Meut

* Choukrane : "merci" en langue arabe.