28/08/2007
Le "breton condamné" : des explications de l'auteur de la question
Le Breton qui a interrogé Xavier North à Buenos Aires (lire notre précédente) n'est autre que le blogueur Nevern, qui précise les circonstances dans ce message (les intertitres sont de Rezore) :
"Bonjour Christian, Merci de relayer l'information et d'avoir trouvé sur le site les informations précises. Je profiterais de votre blog avant de préciser plus en détail non seulement la présentation de Mr Xavier North, la question que j'ai posée, la réponse faite et les aussi les personnes présentes. Mr Xavier North parlera pendant une heure, lisant principalement ses feuillets, sur le fond et dans la voix "la grandeur de la France" et la place de la france dans le monde pour conclure après ( nous nous rejoignons avec d'autres auditeurs sur un manque d'élan et de désir dans son discours) sur le français doit co-exister avec d'autres langues dans un environnement plurilingue. Applaudissements orchestrés par l'Attaché Culturel.
Des questions ?
Des questions. Oui, monsieur. " Monsieur le délégué, je m'appelle AG, réside à BA depuis maintenant 10 ans et enseigne la langue française et la langue bretonne (1-sans avoir le niveau 2- 3 élèves mon fils et deux amis). Silence, petit rire flûté et regard vers l'attaché culturel. " Je ne savais pas que l'on enseignait le breton à Ba". Ma question :" Vous n'êtes pas sans savoir que le breton est dans une situation critique. Nous perdons 26 locuteurs par jour. Le breton est en thérapie intensive. Selon l'Unesco et selon peut-être des calculs simples, le breton sera condamnée aux alentours du 15 octobre 2001, nous souhaiterons savoir quelles sont les actions du gouvernement pour empêcher cela et gommer de par la même la déclaration traumatisante de 1794 de l'abbé Grégoire".
Silence et blablablablablablablabla... pendant 10 minutes sans une information précise puis "la langue bretonne est condamnée", puis "Je vous l'ai dit quand j'ai parlé des 30 trentes glorieuses et des parents qui n'avaient pas transmis". A noter que l'expression employée dans sa conférence disait "La langue française s'est imposée face aux langues régionales". Toute seule comme une grande sans aucune action coercitive. blablalbla . médias, communications....puis plus catégorique "L'état n'a pas d'argent" et de citer (si mes oreilles ne me trahissent pas), "je ne sais plus le nombre de langues à considérer" et de conclure Le Président l'a dit "Nous ne signerons pas la chartre européenne" mais le Président a fait une déclaration".
Autre question : "Mais quand même..."
Silence autre question. Madame. Oui. " Quand même je vous voudrai revenir sur ce que vous dites. La langue bretonne est liée à une histoire et elle est , elle, une vraie langue de civilisation" pas de réponse. Mr le délégué se recroqueville et son sourire se transformant en rictus laisse passer un "Vous avez raison madame". L'attaché culturel semble agacé et dit : "Bon, une autre question, autre que le breton" Oui. Monsieur. Dans le fond. "Bonsoir, je suis breton mais ma question sera autre. (rires dans la salle). La question aura trait à la politique audiovisuelle française.
Le directeur de l'Alliance francaise insistera auprès de professeur et d'élèves afin qu'ils expriment combien ils étaient contents d'être ici à cette conférence et d'avoir écouté le délégué et d'apprendre le français. Ce que feront deux élèves de façon maladroites. Le signal de départ est donné. Les gens se lèvent. Une femme devant moi se lève, se retourne et me raconte cette histoire avant d'éclater d'un rire frais et cristallin. "Je suis argentine et nous avons vécu 9 ans en France. Ma petite fille de 5 ans arrivant dans son jardin d'enfant explique à une autre petite fille qu'elle est argentine et française, la petite lui répond: "B'n, oui, c'est comme moi je suis française et bretonne".
Ce qu'il faudrait préciser et qui plonge toute cette situation dans l'absurde est qu'étaient dans la salle de conférence les éminents membres de l'oulipo : ouvroir de littérature potentielle. L'absurde historique vécu n'est pas que ces messieurs travaillent sur des nouveaux mots , des nouveaux sons, de la pataphysique ou des algorythmes et non que les autorités françaises consacrent leurs travaux mais que ces mêmes autorités ne puissent pas voir l'importance des langues et par leur aide publique ne permettent pas aux gens qui le veulent de récupérer les sons, les mots et le merveilleux des mots des langues régionales.
Boulets rouges
Messieurs, ne vous cassez pas la tête pour inventer des mots nouveaux . Il ne suffit que collecter des mots anciens et abandonnés pour ouvrir le coffre du merveilleux et en inventer d'autres pour le faire voyager Mr le Délégué Xavier North a répondu comme au 19 ième siècle et effectivement tout ressemblait aux 19 ième et donnait une impression de déjà vu. Flaubert l'aurait écrit: oui, les comices agricoles, Rodolfe c'est moi, la langue Bretonne, Emma Bovary, les maquignons sont aux culs des vaches et les autorités viennent de terminer leur discours bien humanistes et pensants. Mais voilà, la chose ne s'arrête pas là car la Francophonie ne peut et ne pourra pas se présenter dans le monde si elle ne fait pas réllement bonne figure et sauve ces langues régionales.
Ah quoi bon tirer à boulets rouges sur la langue anglaise (hégémonique) si on traîne un parfum d'exterminateurs de langues. Certes, il est plus facile pour Mr Xavier North (du moins il le croit) de conférencer à Buenos-Aires qu'à Carhaix. C'est pourquoi, les réseaux de la diaspora bretonne doivent être attentifs et demander à la fonction publique des comptes, non seulement pour la langue bretonne mais aussi pour les autres langues et le principe non seulement de diversité linguistique mais de diversité écologique. En effet, certains anthropologues notent que diversité linguistique et diversité écologique ont le même bourreau: un certain ethnocentrisme."
16:00 Publié dans Breizh/Bretagne, Brezhoneg/Langue bretonne, Galleg/français, Yezhoù/langues | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Français, breton, Buenos Aires, Argentine