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13/05/2010

Redadeg : courir pour une idée

"Ar Redadeg, la course-relais pour la langue bretonne, est passée en pleine nuit, à 1h30, mercredi, dans les rues d'Auray. Objectif : courir pour soutenir la langue bretonne en récoltant des fonds pour son enseignement et sa transmission. Journal d'un participant.


1 h 30 du matin, Auray, km 351. La nuit est fraîche. Nous sommes trois coureurs qui attendons, avenue Wilson, dans ma voiture, à côté du panneau du kilomètre 351 posé par les organisateurs. André Arhuero, président de l'association Douar Alré; Frédéric Barbary, pour le magasin Breizh ma bro et le Bar breton (Brec'h), et moi, en tant que président de l'association Kerlenn Sten Kidna, association de cours du soir de breton pour adultes en pays d'Auray. Deux associations, deux entreprises et... une élue : ce kilomètre a été acheté par Kaou Hulaud, adjointe au maire d'Auray et conseillère régionale, qui a volontiers accepté que nous courions à sa place. La première voiture de la Redadeg arrive à l'heure et nous donne les tee shirts rouges où nos kilomètres respectifs sont inscrits. Le convoi suit : une camionnette, deux voitures, deux cyclistes qui font la circulation. Les warnings sont mis. La musique (bretonne) est à fond, notamment l'hymne de la Redadeg composé cette année par le Pluvignois David ar Gall, et enregistré par des enfants des écoles Diwan avec le groupe Les Ramoneurs de menhir.

Dans la camionnette deux animateurs, le Brec'hois Patrick Dréan et Monique Ar Voulc'h, annoncent qui a acheté chaque kilomètre. Le coureur précédant me passe le relai, un tube symbolique dans lequel a été mis un texte écrit par un écrivain breton, qui sera lu à l'arrivée à Pontivy, le 15 mai. En route.Les rues d'Auray sont désertes. En 2008, première édition de la Redadeg, elle passait à 17 h. Des sonneurs de la Kevrenn Alré et des chanteuses étaient venues animer la place piétonne derrière la mairie. Nous avions couru avec des enfants des écoles. Cette année, il n'était pas possible d'organiser un tel rassemblement en pleine nuit. Nous sommes donc entre adultes, pour l'instant. Au carrefour du Ballon un parent d'élève de l'école Diwan prend le relai. D'autres personnes attendent plus loin. En courant, on se réchauffe.

2 h 40, Pluvigner, km 362. Les relais se sont bien enchaînés depuis Auray. A l'arrivée à Pluvigner, une enfant court un km, accompagnée d'une adulte. Nous ralentissons le rythme, ça repose un peu. D'autres personnes nous attendent plus loin : des enfants, des parents, deux employés municipaux et un conseiller municipal, Christophe Lacombe, qui courent les km achetés par la commune. Les organisateurs ont eu l'idée de nous faire faire le tour du bourg : c'est que ça grimpe, à Pluvigner.. A la sortie du bourg, je prends place dans la camionnette pour me reposer. S'arrêter fait du bien, mais il faut lutter contre le froid persistant, alors que je suis en sueur, dans cette camionnette ouverte aux vents. On me sert un café. Plusieurs parents d'élèves de Diwan Baod (Baud), prennent le relai. Un peu plus loin, c'est tout un groupe de jeunes du bagad de Locminé (Kevrenn Locgunec'h) qui nous rejoint : il y a presque une dizaine de coureurs entre Pluvigner et Landévant ! La foule ! On se prend en photo, on rigole. Une personnalité, le navigateur Eugène Riguidel rallie également la course avec des membres de sa famille. Puis, à un relais, tout ce groupe s'arrête. Reste une dame venue courir avec son chien en laisse.

4 h, Landévant, km 373 : Eugène Riguidel réapparait. Une petite fille et un adulte courent avec lui. Le navigateur est un fidèle : il a fait traverser la Loire aux coureurs avec son bateau mardi matin, à Saint-Nazaire. Sortie de Landévant : certains acheteurs de km n'ont pas prévu de coureurs. C'est aux accompagnateurs de courir. Je reprends la course. Les premiers mètres sont frigorifiants. La température affiche 4 à 5 degrés. J'ai les doigts engourdis; regret de ne pas avoir pris de gants... Mais courir réchauffe.

4 h 36, Brandérion, km 379. Nous traversons Brandérion désert. Patrick Dréan et moi courrons les deux km achetés par notre association. Les relais se font plus rares sur ce tronçon. Patrick remonte dans le camion où il assure l'animation en breton avec Monique Ar Voulc'h. Frigorifiés eux-mêmes, ils tentent de donner courage aux coureurs en chantant et racontant des histoires. La nuit commence à s'éclaircir.

5 h 16, Hennebont, km 385. On tient le bon bout ! Nous sommes deux coureurs qui traversons la ville d'Hennebont. Déserte. Il y a un peu plus de circulation. Un troisième prend un relai un peu avant la mairie. Puis nous descendons vers le Blavet où le groupe qui prend en charge la portion Hennebont-Bannalec nous attend. Un relayeur est présent. Des cyclistes. Un conseiller municipal d'Hennebont aussi. Trois quatre minutes afin que chacun récupère ses affaires et que les nouveaux investissent les véhicules. La course repart, direction Lanester par les bords du Blavet.
A cette heure matinale, les oiseaux se livrent à un vrai concert de chants variés et agréables à entendre. Ils me font penser à la variété des chants et des langues humaines. Comme la diversité biologique et animale, la diversité linguistique est, elle aussi, menacée.
Hier, mercredi midi, le site internet de la Redadeg affichait 1060 km vendus sur les 1.200 km à vendre.
Arrivée prévue samedi 15 à 17 h 30 à Pontivy, en passant par Quimper, Morlaix, Saint-Brieuc, Carhaix... 1.200 km auront été courus : dans le froid, sous la pluie, de jour comme de nuit, par des milliers de relayeurs de (presque) tous âges. Ils courent pour une idée : montrer, pacifiquement, leur attachement à la langue bretonne et à sa transmission de génération en génération.


Christian Le Meut*
*Journaliste, président de Kerlenn Sten Kidna; kilomètre 351 et quelques autres ensuite...

Une version plus courte de ce témoignage est parue dans Le Télégramme, édition d'Auray, du jeudi 13 mai 2010.

http://www.letelegramme.com/local/morbihan/vannes-auray/a...

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